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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 22.djvu/817

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distribution des cours est demeurée invariablement la même ; une année pour le Droit romain d’ensemble, une année pour l’histoire du Droit romain et deux années pour l’explication des Pandectes. Pour le dire en passant, ce n’est pas là une des moindres causes d’un certain déclin dans l’influence scientifique de l’Allemagne. Celle-ci qui, jadis, faisait également reposer toutes ses institutions juridiques sur le Droit romain et sur les interprétations de premier ordre qu’en propageaient des Savigny et des Ihering, a entendu refondre complètement ses codes ; elle a voulu en faire, elle on a fait une œuvre moderne, attentive au nombre croissant des intérêts en conflit et y introduisant des principes de réglementation nouveaux. L’Italie, elle, considère que le vieux droit romain est toujours son droit national et elle met sa fierté à s’y tenir.

Les avantages et les inconvéniens de cette fidélité scrupuleuse sont également visibles. Une si longue pratique d’institutions si éprouvées ne peut qu’affiner le sens juridique, en lui donnant de la suite, de la clarté, de la rectitude, un sévère esprit d’ensemble. L’inconvénient le plus apparent est de ne pas donner assez d’attention à ces branches du Droit que le Droit romain ne connaît pas, parce que trop de nouveaux intérêts, trop de formes nouvelles de la vie sociale sont demeurés en dehors de ses déductions. L’enseignement s’interdit ainsi ou du moins néglige trop des termes de comparaison qui compléteraient heureusement ses vues traditionnelles[1]. Il semblerait que l’énorme extension de l’émigration italienne eût dû encourager le pays à desserrer quelque peu son nationalisme juridique et à emprunter davantage au Droit international. On me fait observer en souriant que le souci des intérêts de ses émigrés temporaires ne l’exige pas autant qu’il pourrait le sembler. Quelle que soit la nationalité qu’ils revêtent comme un manteau protecteur, au fond ils ne perdent jamais leur nationalité primitive : à leur retour, si lointain qu’il soit, c’est toujours à titre d’Italiens qu’ils seront jugés.

Ce qu’on peut considérer comme plus grave, c’est que le commerce trop exclusif avec le droit romain conserve et même développe un esprit bien étatiste. Ceux qui comptaient pour le royaume tout entier sur les progrès de l’association et sur le

  1. On y trouve cependant un enseignement qui est absent des universités françaises et de beaucoup.d’autres, c’est l’enseignement du Droit ecclésiastique.