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d’hectares, et le temps presse, car ces travaux devront commencer dans quinze jours, dans un mois au plus tard. Or, souvent la terre est encore couverte par des récoltes : récolte des pommes de terre, récolte des betteraves à sucre ou fourragères. C’est là un travail formidable, quand il ne reste dans les fermes que des femmes, des enfans ou des vieillards ! Bien mieux, les attelages font défaut. Beaucoup de chevaux ont été réquisitionnés, beaucoup de bœufs ont été vendus. — Il ne faut pas se le dissimuler, dans bien des cas, nos champs resteront en friche jusqu’au printemps. La vigne ne sera pas taillée et ne recevra pas les façons qui lui sont nécessaires. Mais nous avons cependant confiance dans l’invincible énergie de la population rurale. D’un bout à l’autre du territoire, on fera des efforts qui ressembleront à des miracles, et, de même que la jeunesse partie à la frontière se sera montrée vaillante, la famille gardienne du foyer se révélera forte, ingénieuse, obstinée. Notre vieux sol a produit des défenseurs : sous l’effort redoublé de ceux ou de celles qui restent, il produira encore des moissons.

A cet égard, la division de la propriété et de la culture faciliteront une tâche que rendrait presque impossible l’emploi de la main-d’œuvre salariée sur des grandes exploitations. Les désastres, à tout le moins, seront limités ou conjurés, et ce serait bien mal connaître le courage du paysan français, — comme celui de la paysanne française, — que d’annoncer la disette et de prévoir la stérilité de nos guérets délaissés.


D. ZOLLA.