beauté de la maison de Dieu. Ces façades sont le triomphe de l’art gothique, et la façade de Reims est la plus belle de toutes. Elle marque les derniers progrès réalisés depuis la fin du XIIIe siècle jusqu’au début du XVe. Elle est l’aboutissant de tout ce que le gothique avait cherché. Lorsqu’après l’interruption provoquée par la guerre de Cent Ans, l’architecture gothique s’épanouit au XVe siècle dans un nouvel élan de joie triomphale, c’est la façade de la cathédrale de Reims qui fut l’inspiratrice de l’art nouveau. Les merveilles du XVe siècle, façades de Troyes, de Meaux, d’Abbeville, de Tours, surtout celle de Rouen, la plus légère, la plus aérienne qui soit, dérivent d’elle.
Toutes elles sont belles, nos églises gothiques et toutes différentes les unes des autres. Comparé à l’art grec, le seul qui puisse en être rapproché, l’art gothique a pour lui sa prodigieuse variété. On ne peut bien comprendre et apprécier une de nos églises sans la comparer aux autres, sans rechercher en quoi elle leur ressemble ou en diffère, et sans marquer ce qui est le mérite de chacune d’elles, c’est-à-dire la part de nouveauté qu’elle apporte, la place qu’elle tient dans l’évolution générale de l’art. De l’une à l’autre, dans chaque église même, les changemens, les progrès sont apparens. Presque jamais une grande église n’a été l’exécution fidèle d’un plan primitif ; et, au lieu de le regretter, comme on le fait souvent, il faut nous en féliciter. Chaque nouvel architecte qui est intervenu dans la direction de l’œuvre n’a pas hésité à modifier les plans de ses prédécesseurs, et, pendant tout un siècle, jusqu’à la guerre de Cent Ans, ce fut une suite ininterrompue de progrès qui nous font passer des cathédrales de Paris et d’Amiens à celle de Reims.
Avant de montrer par quoi elles diffèrent, montrons les caractères qui les unissent. Il en est un fondamental : toutes nos églises gothiques, sauf de rares exceptions, s’ordonnent avec l’accompagnement de deux tours sur les côtés de la façade. La tour, principe de la défense, attribut des demeures princières, la tour indiquant toujours la maison du roi, fut choisie comme devant marquer aussi la maison de Dieu. Ces tours que nous appelons des clochers, ce sont bien des clochers, puisqu’elles enferment des cloches, mais ce sont surtout des tours d’apparat, de pures œuvres de beauté. Et par leur terminaison, par leurs gigantesques flèches, qui ne sont plus des toitures et qui ne