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mouvement qui s’appellera peut-être dans l’histoire : la révolution pour l’idéal[1]. »

Et l’incorrigible idéaliste n’avait même pas attendu 1872, pour juger la nouvelle Allemagne. Longtemps avant la célèbre Lettre à un ami d’Allemagne, de Renan, dès le mois d’août 1871, elle écrivait l’admirable Réponse à un ami, d’où nous détachons ces lignes : « Nous aurons à plaindre la nation allemande de ses victoires autant que nous de nos défaites… Toutes ces grandes organisations, où le droit, la justice et le respect de l’humanité sont méconnus, sont des colosses d’argile… Eh bien ! l’abaissement moral de l’Allemagne n’est pas le salut futur de la France, et si nous sommes appelés à lui rendre le mal qu’elle nous a fait, son écrasement ne nous rendra pas la vie ! Ce n’est pas dans le sang que les races se retrempent et se rajeunissent. » Et elle ajoutait, en voyant le triomphe momentané de la force sur le droit : « Une nation qui a perdu l’idéal ne se survit pas à elle-même[2]. »

Ces paroles sont bonnes à rappeler, au moment où la France combat pour la liberté des peuples, et où sa cause n’est autre que celle de l’humanité.


S. ROCHEBLAVE.

  1. Impressions et Souvenirs, p. 257.
  2. Impressions et Souvenirs (Réponse à un ami, p. 64-65).