Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 24.djvu/537

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chenaux de nos eaux territoriales pour éviter le champ de mines constitué par les Anglais dans le vestibule nord du Pas de Calais. Le 31 octobre, l’une de ces dangereuses unités coulait le croiseur Hermès, de 5 600 tonneaux, qui, du moins avant la guerre, portait le guidon du commandant de l’aviation navale anglaise. Presqu’en même temps, c’était un paquebot, transport de blessés et de réfugiés belges, qui subissait de graves avaries, heureux de ne pas sombrer à pic. Le 11 novembre, enfin, l’aviso torpilleur Niger, mouillé en rade des dunes, était frappé mortellement…

Ces difficultés n’empêchèrent pas les alliés de renforcer la petite force navale qui opérait sur la côte de Belgique. On dit que nos croiseurs cuirassés y parurent. En tout cas, l’Amirauté envoya un cuirassé, le Venerable (classe Formidable : 1899 ; 4 canons de 305 millimètres, 12 de 152 et 16 de 47 ; 225 millimètres de cuirasse ; 18 nœuds de vitesse) dont les grosses pièces contrebattirent avec succès les plus fortes batteries allemandes. Mais le Venerable, qui déplace 15 000 tonnes, comme nos unités du type Patrie, cale près de 9 mètres, et l’on sent combien ses manœuvres doivent être gênées dans des parages où les contours des bancs sont variables, où il n’y a plus de balisage et où les chenaux de 10 mètres de fond sont déjà rares. Les sous-marins en ont profité pour l’attaquer, heureusement sans résultat. Outre que le cuirassé faisait bonne garde et qu’il était couvert par les navires légers, la faible vitesse à laquelle il était obligé de se mouvoir lui laissait l’avantage de garder à la mer ses doubles filets à mailles d’acier. Peut-être y a-t-il déjà recueilli quelques torpilles Schwartzkopf, retenues captives en dépit de leurs coupe-filets.

Ainsi, tout va bien de ce côté-là, et, aux dernières nouvelles, la petite escadre combinée opérait avec succès contre Zeebrugge. Il n’en est pas moins vrai que les marines alliées n’ont pas sur la côte de Belgique, — pas plus, d’ailleurs, que les Allemands ne les auraient eux-mêmes, — les types exactement adaptés aux circonstances hydrographiques locales. Les trois petits monitors pourraient être, en cas de mauvais temps, « mangés par la mer » à marée haute, quand le flot recouvre de trois ou quatre mètres les bancs les plus élevés. La mobilité et la petite taille des contre-torpilleurs les dérobe aux coups d’une artillerie à laquelle ils ne sauraient opposer de cuirasse ; mais leurs canons