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utiliser, en outre, ce prétexte à l’envoi de légions d’ouvriers, à la préparation de leurs opérations ouvrières et à l’encombrement des quais militaires, remarqué et déjoué à la veille du « coup d’Agadir. : » La campagne menée par les professeurs allemands contre les expériences de Belgrand et des forestiers sur l’atténuation des inondations par le reboisement était d’ailleurs de nature à endormir notre vigilance, et bien peu nombreux sont ceux qui discernèrent dans cet ensemble de faits une manœuvre de « l’avant-guerre » dont la découverte récente d’assises cimentées pour canons, des tranchées-abris et des dépôts de munitions dissimulés aux abords de nos places fortes a révélé tant de détails insoupçonnés. Mais les déforestations de l’avant-guerre ne devront pas être perdues de vue quand le moment sera venu de fixer le chiffre d’une indemnité pour réparer tant de ruines accumulées.

On ne saurait trop se rappeler que, en plaine comme en montagne, le déboisement par défrichement ou par déforestation collabore avec la dénudation du sol pour enlever à la France pendant chaque demi-siècle la population de plus de deux départemens, pour affaiblir la défense nationale autant que le démembrement périodique de deux départemens arrachés à son territoire.


II. — LA RICHESSE GÉNÉRALE

L’augmentation de richesse générale que le reboisement rationnel apporterait à la France a déjà fait l’objet d’une évaluation dans la Défense forestière et pastorale, éditée en 1911 par la librairie Gauthier-Villars, qu’il convient de résumer ici.

Le bilan est établi pour la période des soixante années 1847-1907, dans l’hypothèse où sa situation forestière et pastorale aurait été prospère pendant toute sa durée :

D’une part, la France aurait alors possédé en plus quatre millions d’hectares boisés, dont la production supplémentaire -eût établi l’équilibre entre les importations et les exportations de bois, et qui auraient rapporté chacun trente francs par an.

D’autre part, l’aménagement antérieur de trois millions d’hectares de pâturages en montagne leur aurait, d’après les données développées par M. Audiffred, à la tribune du Sénat, fait rapporter chacun quarante francs par an pendant cette période.