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cette position, M. de Bourmont fut à même de préparer l’expédition d’Alger, sur laquelle il comptait pour se réhabiliter et qu’il se proposait de diriger en personne ; son talent fut d’employer la haute autorité du duc de Raguse à vaincre les résistances que ce projet rencontrait dans les entourages du Duc d’Angoulême. Le maréchal Marmont ne doutait pas alors qu’il ne travaillât pour lui-même et que le commandement en chef du corps expéditionnaire ne lui fut destiné. Quand il comprit qu’il avait été joué, il laissa voir une colère plaisante, dont le général Fabvier fut témoin.

L’événement a montré depuis qu’une expédition n’est jamais si bien commandée que par celui qui en a concerté les détails, et que le rusé ministre avait été bien inspiré en se chargeant lui-même d’exécuter le plan qu’il avait préparé. En deux mois, il s’emparait d’Alger, de Bône, d’Oran, et devenait maréchal dans le temps même où le trône des Bourbons s’effondrait. La situation qu’il laissait au général Clauzel, pour le remplacer au mois de septembre dernier, n’était pas mauvaise, et vraiment pour un chouan, c’était bien finir que de donner une colonie an gouvernement du juste-milieu.

Nous ne pouvions donc nous étonner des égards que les Anglais lui témoignaient ni juger désobligeante leur offre de faire la visite en sa compagnie. Le général Fabvier a simplement répondu : « Merci, je ne suis pas de son régiment, » ce qui a beaucoup fait rire tout le monde.


VALERIE MASUYER.