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Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 26.djvu/218

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par escadrilles isolées, car, à juste raison, les huit unités d’une escadrille agissent toujours de concert) et se sont-ils bornés à éclairer, flanquer, soutenir au combat les divisions de croiseurs, grands ou petits, auxquelles de sérieuses opérations ont été confiées. Faut-il croire que dans le concept général de la guerre navale dominant en Allemagne, c’est au rôle d’engins auxiliaires du combat d’escadre que l’on réduisait ces souples et solides flottilles ? Il se peut. Je reconnais d’ailleurs que c’est au début du conflit beaucoup plus qu’aujourd’hui, après six mois écoulés, que les torpilleurs allemands, réunis en grandes masses, auraient pu frapper des coups décisifs sur un adversaire que sa supériorité numérique ne défendait peut-être pas assez, à cette époque, des surprises funestes. Un « raid » de flottilles, si bien préparé fût-il, se heurterait maintenant à des organismes de surveillance et a des forces navales parfaitement disposés pour le repousser et le punir sévèrement. Mais il y a la brume, ne l’oublions pas, la brume, les temps bouchés qui ont déjà servi les Allemands, qui les peuvent servir encore…


Et les grands croiseurs ?

Les grands croiseurs ou « croiseurs de combat, » — il y en a encore cinq : Von der Tann, Moltke, Seydlitz, Derflinger, Lützow, six même, peut-être, si on a su pousser à fond, dans ces six derniers mois, l’achèvement de l’ersatz Hertha, — pourraient fort bien prendre leur part d’opérations d’ensemble ayant pour objet d’intercepter les arrivages et d’affamer l’Angleterre. Supposons-les réunis en escadre, comme ils l’étaient déjà lors du « raid » malheureux du 19 janvier (le Blücher remplaçant le Lützow indisponible) ; admettons qu’à la faveur de la brume, toujours, ils puissent franchir le grand barrage que forment là-bas, dans le haut de la mer du Nord, les trois « Homefleets, » leurs croiseurs et leurs petits éclaireurs ; établissons-les à quelque 500 milles des atterrages d’Irlande, entre les deux faisceaux de routes maritimes qui viennent de l’Ouest et du Sud-Ouest. Faisons-les ravitailler en combustible, à la mer, par des « neutres » bienveillans (les Allemands excellent, on le sait, à obtenir ce genre de services), ou, tout simplement, par leur prises, qu’ils couleront après en avoir vidé les soutes. On ne voit pas, en principe, ce qui les empêcherait de faire du mal, jusqu’au moment, du moins, où les cinq cuirassés neufs du type