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Allemagne. Ces céréales, devant devenir la propriété du gouvernement, devenaient par ce fait même de la contrebande de guerre et devaient être traitées comme telles. L’Allemagne n’a pas manqué de protester. « Les Anglais, dit-elle dans sa réponse aux États-Unis, ont arrêté le Wilhelmina, bien que sa cargaison ne fût destinée qu’à la population civile allemande et malgré la déclaration du gouvernement allemand qu’on ne l’emploierait qu’à cela. » Mais que vaut la déclaration, même expresse, du gouvernement allemand ? En temps de paix, la courtoisie obligerait à lui accorder quelque valeur, mais en temps de guerre et après tout ce que nous avons vu, il serait trop naïf de le faire. Le gouvernement anglais a donc eu raison d’arrêter le navire, et le gouvernement allemand n’a pas le droit d’appeler cela un empiétement. Il le fait néanmoins et il part de là pour s’excuser lui-même des innovations qu’il introduit dans le droit maritime. L’Angleterre arrêtant les denrées destinées à l’Allemagne, celle-ci se venge en coulant les navires neutres qui passent à sa portée dans une grande étendue de mers. Singulier effet d’une telle cause ! On conçoit que les neutres se révoltent et commencent sérieusement à s’agiter. La force de leur résistance s’accroîtra, s’ils s’entendent pour parler et pour agir en commun. Les belligérans aussi doivent le faire. Un échange de vues vient d’avoir lieu sur ce sujet, à la Chambre des Communes, entre lord Charles Beresford et M. Asquith. Lord Charles Beresford ayant demandé si les procédés allemands seraient l’objet d’une note commune, M. Asquith a répondu : « Je ne peux encore le dire ; mais il y aura certainement une note de la Grande-Bretagne, et j’ai l’espérance que cette note sera commune. » Déclaration qui a été couverte d’applaudissemens.

Chaque jour, on le voit, de nouvelles questions surgissent dans cette guerre qui ressemble si peu aux précédentes. Des engins nouveaux en sont en partie la cause. Les dirigeables, les avions se sont montrés extrêmement utiles comme éclaireurs des armées : comme armes de guerre, ils n’ont pas encore tenu tout ce qu’on en attendait. Cela est vrai surtout des dirigeables dont les exploits ont été relativement médiocres. Un zeppelin vient de lancer des bombes sur Calais où il a tué cinq personnes et démoli deux maisons. Des avions anglais ont été mieux inspirés en volant sur Ostende et sur Zeebrugge où leur tir a fait des ravages d’un autre ordre : en tout cas, ils n’ont tiré que sur des établissemens militaires ou affectés à la guerre, tandis que les avions ou les dirigeables allemands ont vraiment l’air de s’en prendre de préférence aux maisons privées et aux civils. La