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l’appelait depuis sa magnifique défense de Pervyse, où il recevait les obus, assis sur un pliant.

L’attaque commença vers huit heures par un déblayage énergique de la position. Il y eut peut-être quelque hésitation dans les mouvemens qui suivirent, et le fait est qu’en ne s’ébranlant qu’à onze heures et demie du matin, nos fantassins perdirent le principal bénéfice de la préparation : l’ennemi avait eu le temps de se reprendre ; le 8e bataillon de chasseurs ne put déboucher du cimetière par la route de Woumen qu’avec l’appui du bataillon de Jonquières. Encore s’arrêta-t-il au bout de deux cents mètres. Le 151e d’infanterie, qui opérait par la route d’Eessen, gagnait péniblement dans le même laps de temps un autre front de 200 mètres. Ce fut tout le profit de la journée. Le 3 au matin, nous reprenions l’offensive, mais sans plus de succès que la veille. L’attaque manquait toujours de souffle. Nous avancions à peine, quoique bien soutenus par nos 75, qui affirmaient une fois de plus leur supériorité sur l’artillerie ennemie. Pour lui donner quelque élan, le commandement décida d’appuyer l’attaque par toute la 42e division et deux nouveaux bataillons de fusiliers. La journée s’acheva en préparatifs de passage sur l’Yser, en aval et à un kilomètre de Dixmude. Deux passerelles volantes furent amenées, de Dixmude, à cet effet. Brouillard dense, le meilleur des temps pour ces sortes d’opérations. L’un des bataillons de fusiliers devait attaquer parallèlement à l’Yser ; les deux autres, le franchissant plus en amont, devaient se rabattre sur le château, tandis que le 8e bataillon de chasseurs continuerait l’attaque par le Nord. Cinquante pièces d’artillerie concentraient leurs feux sur le parc et les bâtimens ; mais décidément ce manoir enchanté, avec ses fougasses, ses tranchées profondes, ses réseaux de fils barbelés, ses meurtrières à tous les murs, ses mitrailleuses à tous les étages, ses caponnières à tous les coins, dégageait on ne sait quelle électricité répulsive qui avait la propriété, sinon de briser l’élan de nos troupes, tout au moins de l’amortir singulièrement. Le terrain, haché de watergands, n’était pas des plus favorables sans doute. Et dans la brume couvait une tourmente. Bref, à la nuit, nos troupes n’étaient encore qu’à quatre cents mètres du château : nous n’avions pu pénétrer dans le parc. Du côté d’Eessen, nous n’avions même marqué aucun progrès. Enfin, vers Beerst, les troupes belges qui défendaient le front Nord de