Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 26.djvu/473

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




La situation militaire, qui était bonne, s’est encore améliorée ces derniers jours. Sans doute nos progrès sont lents, mais ils sont continuels et ne sont niés que par les communiqués allemands, qui prennent systématiquement le contre-pied des nôtres et de la vérité. A d’autres momens, ils ont été plus sincères : pourquoi le sont-ils aujourd’hui si peu ? Le motif en est dans la période critique, et sans doute décisive, où nous arrivons. La guerre du printemps ne ressemblera probablement pas à celle de l’hiver. Des symptômes nombreux annoncent que l’usure allemande augmente et s’aggrave. Le ravitaillement en vivres et en munitions se fait de plus en plus difficilement dans l’Empire. Nous ne voulons rien exagérer : il est trop tôt pour parler de disette, encore moins de famine ; mais la gêne est incontestable, et l’avenir n’est pas sans inspirer des inquiétudes. En même temps, de nouveaux champs de bataille s’ouvrent à l’action militaire. Le canon des Alliés tonne dans les Dardanelles, et les forts du détroit tombent les uns après les autres. Le monde oriental est ébranlé dans ses œuvres vives, et d’autres questions se posent à côté de celles qui se pressaient déjà dans les esprits. Aussi importe-t-il plus que jamais à l’Allemagne, pour traverser cette phase ardue, d’entretenir coûte que coûte le prestige qu’elle a dû si longtemps à l’idée qu’on se faisait de sa force invincible. C’est ce sentiment qui paralyse encore les énergies des pays neutres, au moment même où il serait de leur intérêt de les manifester. Les occasions qui s’offrent et ne sont pas saisies passent, peut-être sans retour. On comprend que l’Allemagne fasse des efforts presque désespérés pour faire croire au monde que sa puissance est toujours intacte et que, à défaut de la foi qui est ébranlée, elle s’applique à entretenir au moins des doutes dans les esprits. Mais, qu’elle le veuille ou non, la vérité finira par percer les nuages. Nos progrès en Champagne et dans