seront respectés. — Jusqu’à la présente guerre, on regardait l’immunité assurée aux non-combattans comme le plus grand progrès du droit moderne. L’application faite quotidiennement par les armées austro-allemandes de leur droit propre au pays qu’elles occupent, nous montre que ce prétendu progrès n’était que pure illusion. Ces troupes massacrent sans raison les habitans désarmés, s’emparant de leurs biens en dehors de toute nécessité de guerre et simplement pour s’enrichir de leurs dépouilles. Des régions entières sont dévastées, semble-t-il, par pur goût de mal faire ; l’honneur des femmes et des filles n’est plus respecté ; la faiblesse des enfans ne leur épargne même pas les pires mutilations, et des témoins dignes de toute foi nous rapportent des séries de cruautés et d’excès que l’on aurait crus impossibles, et dont les guerres, depuis fort longtemps, n’avaient pas offert le spectacle. — Si un tribunal international devait jamais appeler à sa barre les auteurs responsables de ces crimes, les représentans de la science allemande leur trouveraient dans leurs doctrines une excuse, voire une cause d’absolution. La terreur n’est-elle pas en effet un moyen de guerre, et n’est-il pas humain de torturer les uns pour amener plus vite et à moindres frais la soumission de tous les autres ?
Certains exemples qui viendront bientôt sous ma plume montreront que je n’exagère pas lorsque j’avance ces monstrueuses propositions. Du reste, les intellectuels allemands n’ont-ils pas d’une voix unanime protesté contre les reproches que faisait surgir de toutes parts la conduite de leurs compatriotes, généraux ou soldats ?
Certes, la doctrine de ces anciens qui pensaient qu’aucun droit ne pouvait exister entre ennemis était plus modérée et plus humaine. Le droit est l’instrument de la paix, la guerre qui ne connaît que la violence est par elle-même antipathique à tout droit. Cette idée, logique et presque évidente en apparence, procédait en réalité d’une vue assez superficielle de la fonction du droit. Tout intérêt commun à plusieurs peuples autorise et appelle entre eux la formation d’un droit, car le droit est le serviteur naturel des intérêts communs à plusieurs. Or, les belligérans eux-mêmes ont jusque sous le feu des hostilités des intérêts communs. Ils ont intérêt à ce que les violences de la guerre ne dépassent pas leur objet, à ce que