Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 26.djvu/742

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ouvert ! » Mais que penser de son entourage et des grands feudataires de sa couronne ? La corruption est partout, partout la révolte gronde, et les caisses publiques sont vides. Déjà, la banqueroute est imminente. C’est alors que Faust, inspiré par son terrible compagnon, s’avise d’une merveilleuse combinaison financière, qui va sauver l’Empire et l’Empereur. Avec son associé, il entreprend une formidable émission de papier-monnaie, garantie par de prétendus trésors enfouis dans le sol et qu’il ne s’agit plus que d’exhumer. Bien entendu, ces trésors n’existent que dans l’imagination des deux compères. Aussi le public, comme le souverain, se montre-t-il d’abord incrédule. Jamais à court d’expédiens, nos deux brasseurs d’affaires inventent de l’étourdir par une mascarade gigantesque, où Plutus en personne vient faire de la réclame par la banque Faust et Méphistophélès. Le tour est joué. L’Empereur signe le papier-monnaie, et cela devient une bénédiction. Bourgeois et gentilshommes, l’Église elle-même, pourtant si prudente et si soigneuse de son bien, tous se précipitent aux guichets de la Banque, avides d’y vider leurs coffres et de troquer leur bel or trébuchant contre le chiffon de papier revêtu de la griffe impériale, qui, en réalité, est la griffe du diable.

Triomphe ! L’opération réussit à merveille. Tout le monde devient riche, ou se croit riche, ce qui, provisoirement, est la même chose. L’Empereur, grisé par cette prospérité soudaine, ne songe plus qu’à jouir. Il donne des fêtes, il lui faut des palais, des cortèges splendides, qui se déploient dans d’immenses salles gothiques, hautes comme des cathédrales. Certainement, il a déjà la hantise du style « kolossal. » Faust, de son côté, pourrait se reposer sur ses lauriers, mais nous le savons, un homme de sa sorte ne se repose jamais. Comme l’opulence lui donne du loisir, il songe, pour s’occuper, à faire de la littérature.


On peut interpréter en ce sens le fameux épisode d’Hélène dans le Second Faust. Évidemment d’autres interprétations sont possibles. À travers ce tohu-bohu de réminiscences et de fantômes classiques, de larves allégoriques et symboliques, il est difficile de suivre la pensée du poète, en admettant qu’elle se développe logiquement : ce qui est peu probable. Comme il