Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 27.djvu/345

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les affaires, dit-on, avaient été moins faciles ; bien des fabricans, talonnés par l’angoisse des gros stocks, arrêtaient les acheteurs notables, les prenant par le bras pour les faire entrer chez eux :

— « Est-ce trop cher ? » — « Est-ce le genre qui ne vous plaît pas ? » Quant aux industriels français, éloignés de cette foire par les bas prix de leurs concurrens germaniques, ils déclaraient que nous n’avions pas de débouchés, les cliens d’exportation, étant disaient-ils, imbus de l’idée que la France n’était qu’un pis-aller pour les articles qu’on ne voyait pas à Leipsig.

Aujourd’hui que l’Allemagne, mise à peu près en vase clos, a cessé son exportation annuelle de 7 milliards et demi de francs d’objets fabriqués à travers le monde, la France, à qui elle en vendait pour 560 millions, — un peu plus du tiers de ce que l’univers entier nous fournissait, — se demande s’il ne lui serait pas possible de manufacturer chez elle une partie de ces objets ; si même elle ne pourrait pas aborder au dehors les marchés qui sont devenus inaccessibles à son ennemie.


I

À cette question, l’industrie du jouet nous fournira réponse : bien que secondaire par son chiffre, elle est très capable par sa nature, par la variété des matières qu’elle met en œuvre, de servir d’exemple ; et puisqu’elle a beaucoup fait parler d’elle depuis quelque temps, puisqu’il s’est constitué, sous l’impulsion de patriotes hardis et intelligens, une Ligue du jouet français, nous apprendrons en interrogeant les soldats de plomb, en scrutant les dessous des poupées ou en démontant la mécanique des chemins de fer à ressorts, comment, du point de vue le plus général, l’Allemagne avait su prendre l’avantage en de multiples domaines où rien ne paraissait devoir lui conférer un monopole, et comment à notre tour, par l’emploi de ses procédés de travail, nous pourrons lutter avantageusement avec elle.

Ce qu’elle a fait pour le jouet, elle l’a fait pour vingt industries diverses, pour la bimbeloterie, les articles dits « de Paris, » la bonneterie, les produits chimiques et pharmaceutiques, les teintures, les appareils électriques, la poterie et la verrerie