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Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 28.djvu/214

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tôt, et le plus près de sa frontière. Les considérations sur l’art de la guerre, qui se publieront pendant les prochaines années, seront infiniment intéressantes. Mais n’anticipons pas. Notons toutefois que la forme qu’a prise la guerre actuelle a été très exactement prévue dès 1902 par le remarquable écrivain militaire, le collaborateur éminent du Journal de Genève, le colonel Feyler, dans un article véritablement prophétique, et qu’il faut lire.

Ainsi qu’il a été déjà remarqué, la tranchée n’est point une innovation : elle a toujours existé, bien qu’on l’ait plus ou moins employée selon les circonstances. Peut-être bien d’ailleurs l’armement actuel a-t-il contribué à la remettre en honneur…

En quoi elle consiste, il n’est guère utile de le dire ; chacun le sait ; mille descriptions en ont été fournies dans les journaux. Elle est parfois très perfectionnée, ayant été complétée par des demeures souterraines excavées dans le sol. La vue, assurément, y est limitée ; on n’y découvre pas un horizon étendu comme cela a lieu, par exemple, pour les cavernes des troglodytes creusées dans la colline de Saint-Chamas ou encore dans la vallée de la Loire ; mais on peut y vivre quelque temps et avec un certain confort. Elles ne sont malheureusement pas toutes aussi bien aménagées ; il en est qui sont pleines d’eau, ou à peu près : affaire de géologie, et de forme du sol.

Quant au principe des tranchées, il reste le même que par le passé. Ce sont des excavations dans le sol, en ligne droite, courbe, ou sinueuse, complétées par un parapet formé de la terre extraite, et rejetée sur le bord, en avant, face à l’ennemi. On les appelait parallèles, parce que, dans les sièges où elles étaient d’usage courant, elles étaient creusées parallèlement à l’ouvrage qu’il s’agissait d’approcher.

Le point de départ d’une tranchée est généralement un coin abrité où l’on peut commencer le travail en paix ; une fois qu’on dispose de l’amorce, on la prolonge sans difficulté en terrain exposé, puisqu’on avance à l’abri. Mais il n’en va pas toujours de même. On voit que souvent la tranchée a été commencée en position exposée, ou à peine abritée. Des soldats ont pu, par bonds, arriver à une petite dépression, et, travaillant couchés, ils l’ont approfondie et agrandie, ce qui a permis à d’autres de les joindre et d’entreprendre alors une extension latérale du trou primitif, devenu ainsi l’amorce d’une tranchée. Pour bien