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et que la France et lui n’auront plus à craindre ses conspirations et ses tentatives d’allumer la guerre civile. On croit généralement que le Prince en sera quitte pour une bonne mercuriale, quelques mois de prison, ou qu’on le rendra à sa mère en exigeant la promesse formelle de quitter le Continent.


Valérie à sa sœur.

Le lundi 14 novembre, en descendant pour déjeuner, je fus bien agréablement surprise par l’arrivée de M. de Persigny. C’était le dernier de mes soucis. Il me demanda la permission de m’embrasser, et ce fut avec bien de l’émotion que je lui témoignai le plaisir que j’avais à le voir. Il avait failli être arrêté deux fois à Strasbourg et deux fois dans le pays de Baden. Enfin, il arrivait avec sa voiture et son domestique. Je ne sais pourquoi, dans ce premier moment, il ne m’a pas dit que son domestique eût été chez Laure et qu’il eût besoin d’argent, qu’elle lui avait envoyé.


Mercredi 16 novembre.

Hier, j’ai passé ma journée au salon en écoutant les récits de M. de Persigny. Notre soirée a été remplie par la lecture des journaux. Ils disent que la Reine n’a pas été à Paris, mais à Viry, chez Mme la duchesse de Raguse. Mme Salvage, son amie, logeait à l’Abbaye-aux-Rois, a vu les ministres pour elle. Il lui a été signifié la déportation du Prince en Amérique et l’ordre à sa mère de le suivre dans un mois… Tout à coup, à une heure du matin, Mlle Cailleau entre dans ma chambre et me dit la Reine arrivée. Je saute en bas du lit et cours au salon où la Reine était entourée de ces messieurs. Elle nous a répété ce que les journaux nous avaient déjà appris… Elle compte traîner en longueur, se faire malade, puis aller en Angleterre passer quelques mois et ne se rendre en Amérique qu’à la dernière extrémité…


Arenenberg, samedi 19 novembre.

Claire est venue tout en larmes me lire une lettre que la Reine venait de lui donner de son père. M. Parquin est incroyable de courage, de résolution et de gaieté. Il dit : « Secouez donc le capitaine, qu’il me fasse grâce de sa sensibilité et dites-lui