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desquelles les ruisselets gazouillent, des sous-bois où se joue la lumière, des collines aux formes harmonieuses, de petits étangs où les grands arbres viennent mirer leurs branches.

Et tous ces jolis endroits, ces ruisseaux, ces fontaines, portent les noms les plus jolis du monde : le Bois de la Viergelte ; le Ruisseau des Emerlots ; la Fontaine la Houyelle (est-il rien de plus délicieux que ce vieux mot français ?), la Fontaine-aux-Charmes, la Fontaine-Madame.

Quant à la longue crête qui constitue comme l’épine dorsale de cette forêt, son nom est évocateur des chasses d’antan, des meutes, des piqueurs, des cerfs forcés après des randonnées furieuses : elle s’appelle la Haute Chevauchée.


12 février. — Un régiment de Territoriaux, arrivé dernièrement, comprend, un certain nombre de bucherons du Morvan. Comme ils bivouaquent en pleine forêt, les Morvandiaux, trouvant à portée de main du bois en abondance, sont en train de se confectionner de merveilleuses cabanes. Ce travail parait les intéresser très vivement.

Près d’une ferme, les coloniaux, eux, ont édifié un véritable village nègre : toute une suite de huttes aux toits pointus comme on en trouve au Soudan, et dans les pays tropicaux. Ils ont construit au centre une jolie petite chapelle, une chapelle en miniature qui fait l’effet d’un joujou d’enfans. Au-dessus de la porte, une inscription latine :


REGINÆ VICTORIÆ, PILOSI MILITES xe INF. COLON. ÆDIFICARUNT HANC ECCLESIAM.


11 février. — Vers midi, les Allemands, en colonnes par quatre sur un front de 3 ou 400 mètres, prononcent une attaque en masse contre notre bataillon, au Nord de l’ancien saillant de Marie-Thérèse.

Arrêtés en tête par un feu d’infanterie, battus en queue par l’artillerie, les quatre colonnes sont rejetées, laissant de nombreux cadavres sur le terrain.

A treize heures, notre artillerie commence la préparation d’une attaque qui se déclenche à quatorze heures.

Deux compagnies du xe bataillon de chasseurs s’élancent sur les positions ennemies. Accueillis par une vive fusillade et un