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réquisitions ! — « Or, si vous forcez les ventes, déclarait en 1792 notre conventionnel, vous attaquez l’industrie de l’Agriculture qui, seule, peut produire l’abondance. Car il n’y a point de maxime qui puisse anéantir celle-ci : c’est que l’industrie, en quelque genre que ce soit, ne peut s’accroître, ou seulement se soutenir, qu’avec la liberté de ses propres spéculations et la libre disposition de ses produits.

« Sans doute, vos lois peuvent ordonner de l’emploi de la production de la terre, circonscrire les entreprises du cultivateur et régler ses opérations, mais de telles lois ne lui donneront jamais le courage et le génie ; elles ne feront au contraire que les étouffer, et la terre, resserrée par vos entraves et vos règlemens, sera frappée de la stérilité qui suit toujours la servitude. »

Au même moment, un député de la Législative entré à la Convention, Lequinio, défendait avec autant d’éloquence que de bon sens la cause de la liberté commerciale : « A force d’agitations, disait-il, on est parvenu à étouffer le commerce du bled, à le rendre odieux, et (je ne connais pas de meilleure expression) à stériliser par-là presque tout le sol de la République. Tant que le commerce des bleds ne sera pas actif, le peuple se trouvera dans la misère. Je soutiens qu’il faut, non seulement protéger, mais qu’il faut mettre en honneur le commerce des bleds.

« Je regarde un homme qui se livre au commerce des bleds comme un des bienfaiteurs de la patrie. »

Les députés de la Constituante, les représentans de la nation à la Législative, les Conventionnels eux-mêmes étaient résolus à défendre la libre circulation des subsistances, à lutter contre les préjugés populaires, a dénoncer comme des chimères absurdes les prétendus accaparemens, et à déclarer que la taxation des denrées constituait un attentat contre la propriété.

Le 15 octobre 1792, quelques semaines après la réunion de la Convention nationale, les comités de l’Agriculture et du Commerce rédigeaient une adresse au peuple français, et s’efforçaient de l’éclairer :

« On vous parle quelquefois de la taxe des blés, disait le rapporteur, mais le blé est la propriété des cultivateurs, le fruit de ses travaux et la juste récompense de ses peines. Ne