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vantent sa bonne mine, sa tournure accomplie, la finesse et la régularité de ses traits. » Un chroniqueur français, qui le vit plusieurs fois à Paris, nous apprend qu’il était d’une taille moyenne, très bien proportionnée. Le cardinal Bessarion, dans son oraison funèbre, vante la beauté doses cheveux blonds, qui, devenus blancs avant l’âge, ajoutaient une impression de respect à l’effet d’une grâce majestueuse. Une longue barbe blanchie également de bonne heure, étalée sur la poitrine, lui donnait un grand air. Il était d’une agilité remarquable dans tous les exercices du corps, merveilleux cavalier. Il était infiniment populaire à Byzance.

Il avait, je l’ai dit, succédé sur le trône impérial d’Orient à son père Jean V, le 16 février 1391, après avoir été dès longtemps associé à lui, en place de son frère aîné Andronic, déshérité. Toute sa vie s’était jusqu’alors passée dans les pires tribulations. Le long règne de son père, ce règne d’un demi-siècle, s’était écoulé dans les plus affreuses circonstances intérieures et extérieures : à l’intérieur, les luttes fratricides contre l’empereur Cantacuzène et contre le fils aîné de Jean, l’empereur Andronic IV ; à l’extérieur, la guerre incessante, journalière, contre les Turks, contre leurs deux redoutables sultans, Mourad et Bajazet.

Au moment de l’avènement définitif de Manuel par la mort de son père, son empire, en dehors de la lointaine Morée, se réduisait presque à la seule cité de Constantinople et celle-ci, depuis ce moment, avait été presque constamment assiégée par l’armée de Bajazet. En 1396, un vaste et puissant effort de l’Occident n’avait abouti qu’à la lamentable déroute de Nicopolis sur le Danube, dont j’ai parlé plus haut.

En l’année 1399, il y eut à Constantinople, toujours aussi douloureusement enserrée par son cruel ennemi, comme une lueur d’espoir. Le fameux maréchal de Boucicaut, le plus intrépide des chevaliers d’Occident, un des rares survivans de Nicopolis, et qui avait déjà séjourné à Byzance et en Orient pour négocier la rançon du comte de Nevers et de ses quelques compagnons de captivité, reparut à Constantinople à la tête d’un secours de douze cents hommes d’armes, archers et valets armés. Ce secours avait été promis dix-huit mois auparavant par le gouvernement de l’infortuné roi Charles VI de France aux ambassadeurs que Manuel lui avait envoyés sous la conduite de son oncle Théodore Cantacuzène Paléologue.