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milieu desquels s’étaient écoulée sa jeunesse, ne s’était marié que fort tard. Il avait épousé en 1391 Irène, fille de Constantin Dragasès, qui, dès la fin de cette année, lui donna un premier fils, nommé Jean. Un second fils, Théodore, vit le jour peu après. Quatre fils en tout naquirent de cette union. Le dernier né fut Constantin, surnommé Dragasès du nom de sa mère, l’héroïque dernier souverain de Byzance. En partant de Constantinople, l’empereur Manuel, pour gouverner l’empire en son absence, nomma son vicaire le fils de son frère Andronic, son neveu, le futur Jean VII Paléologue, de triste mémoire.


II

Manuel, pour ce fameux voyage que je vais raconter et qui allait durer près de quatre années, quitta sa capitale le 10 décembre de l’an 1399. Il s’était, à cet effet, embarqué avec Boucicaut sur les galères de Venise, ainsi que nous l’apprend une très précieuse note écrite en grec à la fin d’un manuscrit conservé à la Bibliothèque nationale[1].

« L’Empereur et le maréchal, dit le biographe contemporain de ce dernier, l’auteur de ce livre savoureux intitulé : Le livre des faicts du bon messire Jehan le Maingre, dit Boucicaut, mareschal de France et gouverneur de Gennes, tant errèrent par mer depuis que ils furent partis de Constantinople, comme dict est cy-dessus, que ils arrivèrent à Venise. Et là voulut un peu séjourner l’Empereur pour certaines choses qu’il avait à faire avec les Vénitiens. Sy se partit de Iuy le maréchal pour venir devant en France, pour annoncer sa venue, et dire la cause qui luy amenoit. »

Si l’empereur fit ce long détour de Morée, c’est qu’il voulait confier à son frère très aimé, le despote Théodore de Morée, l’impératrice Irène, sa femme, et ses trois si jeunes fils Jean, Théodore et un autre. Il débarqua avec ces êtres précieux non loin de Sparte, ou plutôt Mistra, la cité médiévale qui a succédé Il la ville de Lycurgue, capitale du despotat de Morée. Dukas, un des principaux chroniqueurs byzantins pour cette époque, affirme d’autre part que Manuel, arrivé aux rivages du Péloponèse, se sépara de sa femme et de ses enfans, en les envoyant à Modon

  1. Fonds grec, mns. n° 557.