Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 30.djvu/901

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour représenter les intérêts du slavisme dans les Balkans. L’Autriche se chargeait d’assurer, vers le Levant, la percée du germanisme ; la Porte lui abandonnait l’administration de la Bosnie-Herzégovine, en majorité peuplées de Yougo-Slaves qui sont de la famille des Serbes ; elle acceptait un régime spécial, en fait une vraie tutelle, sur la province de Novibazar, coin glissé entre la principauté de Serbie et les Serbes du Monténégro, route possible d’un chemin de fer qui prolongerait jusqu’aux plaines de la Save la ligne Salonique-Mitrovitsa et faciliterait la descente des Autrichiens jusqu’à la mer Egée. L’Autriche profita de ces avantages pour accuser son emprise économique sur la Serbie ; elle renforça ses lignes de navigation danubiennes, elle poussa jusqu’à la citadelle de Semlin, qui affronte Belgrade, ses chemins de fer avançant vers la Serbie ; ses agens s’insinuèrent si bien à la cour serbe, que le prince Milan, devenu roi en 1882, lié par un traité de commerce et par des obligations personnelles, semblait n’être plus à Belgrade qu’un préfet de François-Joseph ; cette sujétion dura jusqu’au retour des Karageorgevitch, en 1903.

Dans le traité de Berlin avait été inséré, sur la demande de l’Allemagne et de l’Autriche, un article stipulant que, aussitôt après la conclusion de la paix, les quatre États intéressés, c’est-à-dire l’Autriche, la Serbie, la Bulgarie et la Turquie, se concerteraient pour raccorder avec le reste de l’Europe les voies ferrées existant dans la presqu’île des Balkans, lesquelles n’avaient jusqu’alors aucune jonction avec le dehors. L’établissement de cet accord fut l’objet de la réunion, dite « conférence à quatre, » qui siégea à Vienne en 1882-1883, et aboutit à la conclusion d’un traité. En vertu de cet acte, les raccordemens à construire étaient au nombre de deux. L’un, partant de Bellova (alors frontière de la Roumélie orientale et de la Bulgarie), passait par Sofia, pénétrait en Serbie, aux environs de Pirot, desservait ensuite Nich et Belgrade, entrait en Autriche-Hongrie en traversant la Save et aboutissait à Budapest. L’autre, s’embranchant à Nich sur le précédent, se dirigeait vers le Sud en remontant vers la vallée de la Morava serbe, franchissait la frontière serbo-turque à Kistovatz (ou Zibeftchc) et rejoignait près d’Uskub la vallée du Vardar, ainsi que la ligne déjà construite et aboutissant à Salonique.

Les travaux de ces deux raccordemens ont été commencés