suffirent point à Juan de Jassu et à Maria de Azpilcueta. Ils agrandirent leur église de Santa Maria et lui annexèrent une abbadia, qui logeait un vicaire, deux prébendiers, et un garçon de service. Tous les détails relatifs à leur administration et à leur vie commune furent minutieusement réglés. Et Juan de Jassu rédigea lui-même les Ordonnances de Santa Maria de Xavier, qui remplissent dix-neuf feuillets de vélin in-folio et qui font vraiment de la Abbadia une petite communauté religieuse. Selon la parole du Christ : « Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux, » il voulait que ces deux ou trois prêtres, par le savoir, la prière et l’étude, fussent le miroir et l’enseignement de la bonne vie pour tous les gens du castillo. Tout à l’heure, dans un simple procès, le ton du défendeur s’enflait et s’élevait à l’éloquence d’une plaidoirie pro domo. De même, ces Ordonnances, composées à l’intention d’un pauvre vicaire et de deux maigres bénéficiers, prennent autant d’ampleur que si elles s’adressaient à un Ordre tout entier : « Nous vous prions d’avoir toujours en mémoire que la vie et la règle primitive des clercs ordonnée par les saints apôtres de Jésus-Christ et ses disciples fut qu’ils eussent à vivre en communauté, ne possédant rien en propre, et que leur demeure fût contiguë à l’église, afin qu’ils marchassent séparés des pratiques mondaines et des nombreuses occasions de péché, se contentant d’avoir le vivre et le couvert sans autres biens terrestres… » Représentez-vous les seigneurs de Xavier et cinq ou six personnes réunis autour de cette pièce dont ils écoutent la lecture, qu’ils signent et qu’ils voient sceller par le vicaire général du sceau épiscopal : vous aurez une idée du grand sérieux de ces existences qui, dans leur solitude, sentaient Dieu au-dessus d’elles et qui mesuraient moins leurs paroles a l’importance sociale de leurs actes qu’à la grandeur naturelle de leurs sentimens. Ils ne regardaient point du côté du monde, mais du côté de l’honneur et du ciel. Aussi avaient-ils toujours l’air de parler pour un faste auditoire.
Tout était fait, lorsque François naquit et que son chrémeau baptismal fut suspendu avec ceux de ses frères et de ses sœurs dans l’église de Santa Maria. On chantait chaque jour des vêpres que les cloches annonçaient. Chaque soir, à l’heure où sonnait la cloche de l’oraison, on chantait le Salve Regina.