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puisque, au moment où j’écris, le nouveau n’est pas entré en vigueur et qu’on en ignore les dispositions essentielles. Mais comme on sait, par les déclarations de lord Grey, qu’il ne s’agit que de l’application plus sévère, plus complète, des dispositions existantes, on est en droit de se demander à quel degré d’énergie arriveront les protestations américaines et quelles pourront en être les suites.


En ce qui touche l’un des neutres du Nord, l’un des neutres « transiteurs, » comme on les appelle couramment, la Suède, cet État médiocrement disposé, on le sait, en faveur des Alliés[1], a déjà fait sentir que les choses n’iraient point sans de graves difficultés, si la Grande-Bretagne persistait dans ses méthodes de resserrement progressif des légitimes libertés des neutres. Un des ministres de la Couronne a déclaré qu’il ne pouvait écarter complètement, quoi qu’il en eut, l’éventualité d’un conflit. Et sans doute on a cherché, on a trouvé même des atténuations sensibles de cette déclaration assez menaçante ; mais il n’en reste pas moins qu’il y aurait des inconvéniens graves à s’aliéner définitivement la nation Scandinave la plus puissante, la mieux armée, — 300 000 hommes parfaitement équipés et pourvus, dit-on, — la mieux placée pour nous nuire, ou pour nuire à nos alliés de Russie, ne fût-ce que par l’interruption des communications de ceux-ci avec les ports de Norvège ; celle enfin qui, devenue industrielle, est en situation d’exporter en Angleterre et chez nous des produits manufacturés fort utiles.

A la vérité, on put croire, l’été dernier, que les opérations si brillantes des sous-marins anglais permettraient aux Alliés de placer les neutres les plus récalcitrans en face des résultats d’un véritable blocus. Le lecteur se rappelle certainement les ravages causés par ces bâtimens de plongée dans la flotte de vapeurs qui, des ports suédois de Bothnie, apportaient aux ports allemands les riches minerais et les fontes brutes de la Dalécarlie si appréciés des hauts fourneaux et des usines de la

  1. Ceci était plus vrai au début du conflit qu’aujourd’hui, fort heureusement. - Les Allemands ont perdu, par leur manière de conduire la guerre, en général, et en particulier par certaines brutalités à l’égard de la marine marchande suédoise, aussi bien que par des actes contraires au respect des eaux territoriales du royaume, beaucoup des sympathies qu’ils avaient su s’acquérir dans la période de « l’avant-guerre. »