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Vis-à-vis de la Hollande, par exemple, que, surtout après l’immolation de la Belgique, elle avait tant d’intérêt à épargner, à rassurer, à se concilier, quelle a été son attitude, quel a été son langage ? Après avoir laissé entendre que l’occupation de la Belgique, sans la possession des bouches de l’Escaut et du Rhin, n’était pas suffisante, elle a cru faire merveille, dans les interviews de M. Zimmermann avec l’un des membres du Parlement néerlandais, en déclarant n’avoir aucun mauvais dessein, aucune convoitise à l’égard des Pays-Bas, mais qu’il était clair que l’avenir des Pays-Bas était de se rattacher économiquement au Zollverein allemand. — La neutralité suisse et l’armée de la Confédération helvétique lui ont inspiré d’abord quelque respect. Mais elle n’a pas tardé à s’émouvoir de la liberté laissée à certains journaux, à des conférenciers, dans les cantons de langue française, ou même de langue allemande, de se montrer francs, c’est-à-dire sévères pour elle. Et, dans ce problème difficile du ravitaillement de la Suisse, en consentant à exporter chez ses voisins la houille, le sucre, et autres matières ou produits qui pouvaient leur être nécessaires, n’a-t-elle pas aussitôt, ne songeant qu’à elle-même, exigé comme condition et contre-partie que la Suisse lui livrât des denrées, matières premières ou produits que la France ne pouvait expédier à ses voisins d’outre-Jura que s’ils n’étaient pas réexportés dans les Empires germaniques ? — Aux Etats scandinaves, si peu suspects de vouloir la gêner, si prêts, au contraire, à lui adoucir les amertumes du blocus, elle n’a témoigné, à eux et à leur marine marchande, que de rares ménagemens.

Elle avait, dans les Etats balkaniques, par diverses parentés de Cours, par des relations commerciales ou financières d’une assez grande importance, et malheureusement aussi par les divisions et rivalités de quelques-uns de ces Etats, des moyens d’action et d’influence. Elle ne s’en est pas contentée. Se doutant bien que sa propre politique, sauf pour la Bulgarie secrètetement gagnée et félonne, ne pouvait être la leur, et que son alliance avec l’Autriche-Hongrie et la Turquie ne lui permettait guère de paraître très favorable à la satisfaction de leurs désirs, elle s’est efforcée de corrompre une opinion qui ne pouvait lui être autrement acquise. L’or allemand a coulé à flots dans les capitales balkaniques, comme à Constantinople, non seulement pour soudoyer la presse et ébranler les