Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 32.djvu/587

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— J’ai une autre bonne nouvelle à vous annoncer, me dit le colonel après être allé conférer un moment avec l’Impératrice. Sa Majesté vous accorde l’autorisation de vous rendre sur le front russe avec un de ses trains sanitaires. Ce sera, sans doute, celui qui porte le nom de la grande-duchesse Marie Nikolaïevna. Je vous ferai connaître le jour et l’heure de votre départ...

Quelques jours après, je revenais à Tsarskoié-Sélo pour y prendre ma « feuille de route. » La neige tombait à larges flocons. Les arbres qui, à ma première visite, ressemblaient à de somptueux lampadaires d’or, étaient maintenant dépouillés. Leurs feuilles gisaient, sous la neige, entre les fûts rigides des pins et les troncs blancs et lisses des bouleaux... Les traîneaux glissaient sans bruit, sur l’épais tapis blanc des avenues. Tout était silence, solitude, blancheur... Et, tandis que le traîneau m’emportait au milieu de ce décor quasi idéal, je me disais : « Quels que soient son passé et son avenir, elle mérite de rester ainsi à jamais dans l’histoire la ville blanche, la ville du mystère, du silence et du rêve où, au milieu de son peuple meurtri mais confiant, vit, aime, souffre, se dévoue et espère, la Souveraine de toutes les Russies, l’Impératrice en voile blanc. »


MARYLIE MARKOVITCH.