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à notre frontière le droit de douane de 7 francs sur le blé, un moment suspendu. Ainsi investi pratiquement d’un monopole, il s’est constitué l’unique acheteur de la France et ses accords avec l’Angleterre et l’Italie permettent aux trois gouvernemens de ne pas surfaire inutilement la marchandise à leur mutuel préjudice.

L’Angleterre s’est réservé l’Australie et les Indes ; le Canada, où le blé est d’une qualité supérieure, est commun entre elle et nous. Les achats, exécutés pour la plupart au-dessous de 25 francs le quintal, n’excéderont pas cette année 12 millions de quintaux pour la Guerre et autant pour le Commerce ; les deux ministères demeurant distincts tant pour les acquisitions que pour les transports. Ceux-ci ont été assurés, en ce qui concerne le service civil, au moyen de l’affrètement, pour deux années à partir de décembre 1915, de cinquante bateaux de toutes nationalités, d’une capacité moyenne de 6 000 tonnes, dont M. Chapsal, directeur du ravitaillement, suit et dirige de son cabinet tous les mouvemens, heure par heure, afin d’en obtenir le meilleur rendement possible.

Chacun de ces cargos revient à 3 000 francs par jour et, quoiqu’ils soient obligés de repartir sur lest, faute de marchandises de sortie, après avoir déchargé leur cargaison dans nos ports, — deux d’entre eux ont été ainsi torpillés à vide, — le fret moyen pour le blé nous revient entre 8 et 12 francs le quintal, très au-dessous du cours actuel de l’armement. Sur le fonds de roulement de 120 millions, voté par les Chambres pour cette opération sans précédent, il a été dépensé l’an dernier 36 millions ; on prévoit pour 1916 un déficit analogue. Mais aussi la France, par cette offre permanente, pèse sur ses prix intérieurs, déjà très avantageux à la culture et, pour maintenir le bon marché relatif du pain, le sacrifice imposé aux finances publiques est bien peu de chose.


II

Ce que l’on a fait pour le blé, pourra-t-on le faire pour l’avoine dont le prix est bien plus élevé (de 50 pour 100) et le déficit bien plus considérable ? En tout cas, l’on aurait pu le tenter pour la viande. La viande, beaucoup moins que les grains, se proie aux statistiques. Le kilogramme de bœuf, de