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REVUE SCIENTIFIQUE

LE SALUT DE NOTRE AGRICULTURE EST DANS LA MÉGANIQUE

A la suite du tableau un peu attristant que j’ai donné dans ma dernière chronique des rendemens moyens en blé de la France comparés à ceux de quelques autres pays, j’ai indiqué qu’à mon avis la cause essentielle en était dans le caractère suranné de nos méthodes de culture. Cette cause d’infériorité, si elle est, semble-t-il, essentielle, n’est pas la seule. Il y faut ajouter d’autres raisons d’ordre plus ou moins social et qui touchent à nos mœurs et notamment les coutumes du métayage et des baux à court terme, et surtout la pénurie de main-d’œuvre. Celle-ci était déjà avant la guerre devenue un danger pressant. Elle est aujourd’hui angoissante.

Nous avions bien changé depuis le temps où Voltaire, qui se piquait d’être, dans le royaume des lettres, un gentilhomme-fermier, s’écriait, après avoir vanté tout ce qui dans l’agriculture produit à la fois l’agréable et l’utile : « Le goût de ces occupations augmente chaque jour ; le temps affaiblit presque toutes les autres. » Ce n’était, hélas ! plus vrai dans la longue période qu’on a appelée l’Avant-Guerre. Les villes tentaculaires avec leurs joies faciles et leurs larges salaires aspiraient lentement et sans arrêt, de toute la force de leurs ventouses fallacieuses, la sève virile des champs dédaignés. Et c’est pourquoi, depuis un assez grand nombre d’années, la question du labourage mécanique se posait et s’imposait impérieusement. Comme dans l’industrie et pour des raisons analogues on sentait la nécessité de remplacer les travailleurs humains exigeans, volages et chers par des machines, qui, elles, ne désertent jamais leur poste, obéissent toujours