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délégués, tous les commerçans suisses qui sont venus avec nous ont fait d’excellentes affaires et pris des ordres très importans.

La Russie ne pouvait, cette année, nous offrir qu’une participation limitée, mais qui entrait à merveille dans le cadre de notre Foire. On sait que le ministère russe de l’Agriculture encourage de son mieux les travaux manuels des Koustaris, c’est-à-dire des paysans produisant, pendant la longue accalmie de l’hiver, les menus objets dont le revenu accroîtra quelque peu leurs ressources. Plus spécialement, les gouvernemens de Moscou, Poltawa, Nijni-Novgorod, Kief, ont régularisé cette production en fournissant aux Koustaris des matières premières, en leur assurant de bons modèles et un paiement facile. Il y a, dans le gouvernement de Nijni-Novgorod, tel village de Wyksa où les petites filles fabriquent des jouets charmans : scènes paysannes, décors de villes, etc.

Cet art ingénu, bien dirigé, bien surveillé, fait naitre en quantités immenses les broderies de fil tiré, les dentelles au fuseau et à l’aiguille, les brocarts, les toiles imprimées, les tapis de laine, les bois sculptés en frêne et en sapin, les articles de fumeurs en loupe de bouleau et en platane, les boites en papier bouilli. Il faut avoir vu et manié ces petits objets d’une vive grâce paysanne. Formes et couleurs surprennent par une originalité tout imprévue. Sur des dessins copiés au Kremlin, d’obscurs paysans ont reproduit des souvenirs d’histoire, parmi lesquels se retrouve souvent le portrait du tsar Michel Feodorovitch. D’autres ont œuvré ces légers colliers de perles nuancés qui se portent en sautoirs sur les corsages. D’autres ont recouvert des fantaisies en bois du beau rouge tchervonny, nuancé d’or. Les provinces russes, j’espère, seront contentes ; nous leur avons fait parvenir de larges commandes de Suisse, d’Espagne, d’Italie, de France surtout. Petites filles de France, qui, sans le savoir, avez reçu bien souvent le jouet classique de Franconie ou de Thuringe, demandez à vos mamans la naïve poupée russe, les charmantes matriochka de sapin qui, sous leurs vêtemens bariolés, fleuris de marguerites, enferment en une seule vingt poupées par un mystère que vous découvrirez ! Et, dans le cadre de la salle à manger familière, où brilla souvent quelque cuivrerie boche, demandez, pour les emplir soit de fruits ou de fleurs, les belles coupes archaïques, d’un style si