Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 35.djvu/834

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour immobiliser momentanément un membre fracturé, sont à peu près les seuls moyens pouvant être employés sur le lieu même où tombe le blessé. Souvent, plus souvent même peut-être, c’est sans aucun pansement qu’il arrive lui-même ou qu’il est transporté au poste de secours. Celui-ci, qui apparaît au blessé comme le lieu béni où il trouvera le salut, varie infiniment suivant les circonstances. Dans la guerre de mouvemens, une maison voisine de la ligne de feu, un pan de mur, un ravin abrité, des balles mais qui n’est pas toujours à l’abri des obus, tel est l’endroit où est installé le poste de secours, qui doit d’ailleurs pouvoir se déplacer et suivre au besoin les mouvemens des combattans. Dans ces installations rudimentaires, et souvent bouleversées par le feu de l’ennemi, les médecins font cependant quelquefois des prodiges. Arrêt d’hémorragies graves et qui seraient rapidement mortelles sans un secours immédiat, examen des blessures, nettoyage des plaies, pose d’appareils provisoires qui permettront au blessé d’être transporté à l’ambulance la plus proche, parfois éloignée de quelques kilomètres, piqûres d’éther, de caféine, de sérum pour relever ceux qui défaillent, piqûres de morphine pour calmer ceux qui souffrent !

Avec la guerre actuelle, la fixité des fronts a permis d’installer, tout près de la ligne de feu, des postes de secours bien organisés, solides, et qui souvent, bien que sous le feu de l’ennemi, sont hors de ses atteintes. Abris défilés creusés au flanc des collines, ou profondément enfoncés sous terre, vastes caves aménagées avec soin, comme celles que j’ai pu voir dans les ruines de Nieuport, fortifiées par un bétonnage pouvant résister aux projectiles de gros calibre. Dans ces abris souterrains sont installés des brancards, des lits même. Une véritable salle d’opérations, bien éclairée, permet de faire des interventions de grande chirurgie, d’aller par exemple rechercher et suturer des plaies de l’intestin dès les premières heures de la blessure, et de sauver des soldats qu’une opération plus tardive eût infailliblement laissés mourir. Dès que leur état le permet, et que le feu de l’ennemi laisse quelque répit, le plus souvent au cours de la nuit suivante, ou parfois plusieurs jours après pour les blessés du crâne et de l’abdomen, ceux-ci sont transportés, autant que possible en automobile, à l’ambulance la plus voisine, où ils trouvent des ressources plus complètes, des lits