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« souffler » et de rouvrir les hostilités à une heure plus favorable.

Le désarmement, dans les conditions actuelles de la guerre, sera d’une importance capitale ; car la supériorité de l’armement n’a jamais été plus décisive. Le seul avantage de l’Allemagne, à la suite de sa longue préparation, tenait à ses armemens. Il ne faut pas que cette supériorité lui reste. Forteresses, artillerie, aéroplanes, dirigeables, vaisseaux de guerre, sous-marins, il y aura mainmise, d’abord, sur ces engins redoutables. Telle sera, nécessairement, la première condition de la paix ; et c’est pourquoi je dis qu’elle sera encore la guerre.

Cette précaution se complète par une autre qui est également habituelle et qui résultera d’une nécessité non moins urgente : c’est l’occupation d’une partie du territoire ennemi. Après la mort des fils et la honte de la défaite, l’occupation des territoires sera la première forme du châtiment. Cette occupation comporte aussi, pour l’avenir, des garanties indispensables, notamment en ce qui concerne la réparation des dommages causés par la guerre. Les réparations devant être énormes comme ont été les dommages et les ruines, l’occupation sera le gage nécessaire, l’unique sûreté suffisante. Le précédent de 1870 suggère une « occupation de garantie » se prolongeant pendant plusieurs années.

Je n’insiste pas. Cette solution préliminaire du problème de la paix est, pour ainsi dire, normale : mais sa technique nous échappe. Il en est, en effet, des conditions du désarmement et de l’occupation, à peu près comme il en est des combinaisons stratégiques et des mouvemens tactiques : seuls, les chefs militaires peuvent en connaître, seuls ils auront le dépôt du secret dans ces heures obscures.

Ajoutons seulement qu’une prière s’élèvera de toutes parts vers eux, à ce moment : « Faites que la guerre ne recommence pas. Prenez vos précautions ; faites, faites que tant de sang versé ne l’ait pas été en vain. Ne parlez pas de paix, ne laissez pas parler de paix, s’il n’est pas bien entendu qu’il s’agit de la bonne paix, de la paix réelle, absolue, définitive, pour laquelle nous, les peuples, avons combattu jusqu’à la mort. Gardez-vous, méfiez-vous ; vous connaissez la ruse permanente qui vous guette. Ne vous laissez pas tromper. Retenez-nous, s’il le faut, sous les armes jusqu’à l’heure où l’ennemi sera sous vos pieds. Mais qu’il soit ligoté de telle sorte que la paix