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pu ainsi équiper 116 navires, d’un tonnage approximatif de 32 000 tonneaux. Ces bateaux, soit en allant en Angleterre chercher du charbon, soit en transportant des cailloux concassés pour l’entretien des routes sur le front des armées du Nord, ont rendu et continuent à rendre de grands services au pays. Plusieurs de ces goélettes se trouvaient, il y a quelque temps, dans le port de la Rochelle : elles étaient reconnaissables à leur phare carré légèrement incliné sur l’arrière et à leur poupe surélevée. Le capitaine, qui chargeait des poteaux de mines dans ses cales d’où sortait encore un relent de saumure, me contait qu’il était venu de Cardiff avec son plein de charbon en cinq jours, alors que les vapeurs en mettent trois. Etant donné le prix actuel des frets, un tel voyage constitue une bonne aubaine.

Laissons la flotte de Terre-Neuve et d’Islande pour parler de nos pêcheurs côtiers. Malgré les grosses difficultés des armemens et l’impossibilité absolue de pêcher dans la mer du Nord, des harenguiers ont été équipés pour jeter leurs filets dérivans dans la Manche, d’octobre 1915 à janvier 1916. Les résultats de la pêche ont été très féconds, puisqu’ils ont atteint 12 000 000 de kilogrammes d’une valeur approximative de près de 9 000 000 de francs.

Les sardiniers, de leur côté, ont armé 1 300 navires en moyenne, en 1916. La production de la campagne n’est pas encore exactement connue : tout porte à croire qu’elle sera satisfaisante. Il ne faut pas se dissimuler toutefois que l’exercice de la pêche a été fortement contrarié par la réquisition des bâtimens à moteur qui tendent de plus en plus à se substituer aux bâtimens à voile ou à l’aviron.

La pêche du thon, qui s’est effectuée avec 305 bateaux, a été tout simplement excellente, étant donnée surtout l’élévation des cours. On estime que le rendement dépassera 2 500 000 kilogrammes. Il a été de 801 540 kilos en août dernier.

On a donc pu voir, dans les ports pittoresques de la côte bretonne, à Concarneau, à Quimper, à Audierne, etc., les filets bleus, légers comme une résille de soie, se balancer au gré du vent le long des mâts, et admirer encore cette année le fleuve argenté des sardines ruisselant au fond des barques grossières. Une grave question a cependant failli faire avorter cette entreprise. On sait qu’il est nécessaire de répandre de la rogue à l’aplomb des filets, pour y attirer le poisson. Or, par suite de