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grand quartier général, qui révèle une très claire vision des événemens et une vigilance stratégique de tous les instans, assure au général de Castelnau la coopération de ce corps et le met à la disposition de la 2e armée.

Le 8e corps se porte donc sur les crêtes d’Essey-la-Côte, et protège ainsi, exactement, l’entrée de la trouée.


Orloncourt, 24 août. — Il est vrai que la situation s’aggrave. Les Allemands se sont avancés entre la Mortagne et la Moselle, et, prenant pour objectif cette dernière rivière, veulent percer entre Châtel, Charmes et Bayon. Allons-nous nous faire manger par ces gens-là ?

Le régiment (95e) a reçu, ce soir, l’ordre de prendre l’offensive.

J’ai assisté au défilé du départ : les hommes étaient joyeux, et, tout en comptant leurs cartouches, ils lançaient en marchant des apartés où ces mots reviennent souvent : « Ce qu’ils vont prendre, les Boches, pour leur rhume ! »

A 4 heures et demie, je me dispose à quitter le bourg avec mon convoi qui doit s’établir en position d’attente à 1 500 mètres de là, quand je vois deux obus éclater sur les hauteurs Nord du village (ce fut là la limite extrême de l’avance allemande dans l’Est de la France) sur lesquelles mes camarades viennent de s’engager… L’un d’eux avait été pour mon chef, le colonel Tourret[1].


En somme, la 1re armée, tout en cédant du terrain, n’en continuait pas moins à faire barrage partout. Cela ne suffit pas. Le 8e corps reçoit l’ordre de contre-attaquer. Il le fait sur Vennezey-Moriviller, aux approches de la trouée, autour de ce village de Kozelieures qui est l’objectif certain de l’ennemi.

C’est pour aider à ce mouvement du 8e corps que le 13e corps, se couvrant à droite sur Ménarmont, maintient les troupes ennemies qui débordent de Baccarat. La bataille se dessine, partout à la fois, à l’entrée du goulot.


V. — POUR DÉFENDRE LA TROUÉE DE CHARMES

Nous venons de voir la 1re armée, après son large mouvement de repli du 23 août, luttant pied à pied le 24, tenant tête à l’ennemi et le retenant sur les pentes des Vosges, tandis qu’à l’Ouest les forces allemandes se- dirigent en masse vers Lunéville et la trouée de Charmes ; le général Dubail a cédé lentement, mais il n’a pas rompu. Tout en pliant, il exécute à la

  1. Capitaine Raimbault.