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tombaient dessus, creusant des trous énormes. Notre artillerie était impuissante de sa position pour arrêter celle de l’ennemi. Tous les attelages des avant-trains avaient été détruits par l’artillerie française.


VI. — OFFENSIVE DE LA 2e ARMÉE

Or, pendant que l’ennemi progresse et se croit déjà, maître des passages, l’offensive, qu’il n’avait pas prévue, s’est développée sur son flanc et presque sur ses derrières. Les divisions de réserve du général L. Durand se sont tenues prêtes : la 59e division est restée en position au Nord du Couronné ; la 68e division, remise sur pied, a occupé le terrain tenu jusqu’alors par la 70e division. Celle-ci reçoit l’ordre d’attaquer sur Courbessaux-Hoéville ; on a ramassé les troupes d’attaque d’Erbéviller jusqu’au Rembétant pour le mouvement en avant de la soirée ; l’ennemi, n’ayant pas attaqué le matin et continuant sa marche sur Lunéville, est pris en flagrant délit de manœuvre. D’un seul bond, le général Fayolle (70e division) enlève Erbéviller, Réméréville, Courbessaux ; les forces allemandes, ne pouvant supporter le choc, se retirent hâtivement sur la crête de Serres.

Nous avons une physionomie très vivante de ce combat de Réméréville, recueillie de la bouche des habitans par un écrivain exact, M. C. Berlet :


Toute la nuit (du 23 au 24), les Allemands (qui occupaient Réméréville) travaillaient à leurs tranchées dans les champs… Au milieu de la nuit, un roulement sourd ébranle les maisons. Une colonne d’artillerie traverse le village au grand trot.

Elle vient de la direction de Courbessaux. Dès le matin, grande animation parmi les soldats allemands. De petites colonnes d’infanterie passent : elles se dirigent à travers champs vers Hoéville et le bois de Faulx (c’est-à-dire vers l’arrière). Serait-ce la délivrance ? On n’ose encore sortir. Des patrouilles circulent dans les rues. La lance est prête et le revolver sorti de la gaine. Chacun attend, anxieux. On guette. On se signale les indices d’une retraite possible de l’envahisseur. Le canon tonne très fort du côté d’Amance et du côté de Dombasle.

Vers quatre heures, un uhlan arrive au galop et s’arrête dans la cour du château. Il est légèrement blessé à la tête. Il dit en riant : Franzouse ! Il cherche à savoir s’il y a d’autres cavaliers dans le village. Il part à fond de train dans la région d’Hoéville. A peine a-t-il disparu que deux hussards français débouchent au tournant de la grande rue : « Où sont les Boches ? demandent les cavaliers. — Pas loin d’ici ; ils sont partis du côté d’Hoéville ; ils sont nombreux. Faites attention. » Les deux hussards remercient