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mais je sais qu’il a écrit hier à mon médecin qu’il tenait pour ma santé aux eaux d’Aix-la-Chapelle. J’écrirai demain à l’Empereur. J’adresserai ma lettre à Lavallette. Adieu, mon cher Eugène, tu es un fils bien tendre pour ta mère. Elle t’en remercie et t’embrasse bien tendrement.

« JOSEPHINE. »


L’Empereur a autorisé l’échange d’Aix-la-Chapelle pour Aix-les-Bains. Il n’a aucune idée d’aller ici et il pourrait aller là. Tout est donc pour le mieux. Joséphine, avant ou après sa cure, ira visiter la Suisse qui jamais ne fut autant à la mode ; mais on a vu que dans un moment de découragement, elle a demandé si, sans déplaire à l’Empereur, « elle pourrait s’absenter un an de France et réaliser le projet qu’elle avait fait avec son fils. » C’est là l’origine de toutes les tracasseries qui assombriront son voyage et qui lui feront voir dans ce qu’on lui mandera de Paris un ordre d’exil, alors que l’Empereur croira aller au-devant de désirs, qui, pour la première fois, seraient raisonnables.

Vers le 5 juillet, Eugène quitte Paris pour rentrer en Italie ; il vient voir sa mère à Aix, mais Auguste, enceinte, reste à Sécheron, près de Genève, où Joséphine lui rend visite.


Aux eaux d’Aix, ce 15 juillet (1810).

« J’ai trouvé à mon retour ici, mon cher Eugène, la seule chose qui pût me dédommager de t’avoir quitté, une lettre de l’Empereur, parfaitement bonne et aimable pour moi et pour Hortense. Il me mande, ce que tu auras lu dans les journaux, qu’il a réuni la Hollande à la France et que cet acte a cela d’heureux qu’il tranquillise la Reine et qu’elle viendra à Paris avec ses deux fils[1]. Tu sais, mon cher Eugène, que sa seule ambition est le repos et l’amitié de l’Empereur. Avec ces deux biens elle aura tous les autres. J’espère que le titre et la fortune de Tascher seront bientôt fixés[2], si même ils ne le sont pas

  1. Par une lettre en date du 8 juillet, l’Empereur a annoncé à Joséphine, presque dans les termes qu’elle rapporte, la réunion de la Hollande.
  2. L’Empereur s’est expliqué avec Eugène sur les mariages Tascher, par une longue lettre en date du 26 avril. (Lecestre, n° 607.) Le 3 juillet, il donne à Louis Tascher, créé comte, 100 000 livres de rente, sur le Domaine extraordinaire, 100 000 à prendre sur les 400 000 livres de rentes réservées en Bavière pour la famille du prince primat, la réversibilité des 200 000 livres de rente, dotation du duché Dalberg et du titre ducal.