nous relâcher. Attention ! nous crie-t-on, l’Allemand va se faire féroce. Quoi donc ? Peut-il se faire Allemand et demi ?
Mais si nous nous trompons, si l’heure est venue où l’Allemagne se sent obligée de consentir à la seule paix possible, celle qui fera que le sacrifice de toute une génération aura servi du moins à en libérer d’autres, et que nos enfans ne vivront pas la vie précaire et semée d’alarmes que nous avons vécue ; nous ne disons pas : si elle se repent, si elle s’humilie, mais si elle avoue, si elle reconnaît l’échec de sa criminelle aventure, qu’elle le dise ; après avoir offert de parler, qu’elle parle. Tout ce que nous avons à dire, c’est que les rôles ne sauraient être intervertis, et qu’on ne nous fera pas faire figure de demandeurs. On ne nous traînera pas à la paix en vaincus et en supplians. Nous avons mis au jeu trop de nous-mêmes, pour que nous puissions chercher la paix ailleurs que dans la victoire, et les ministres de tous les États de l’Entente partagent trop ce sentiment pour ne pas l’avoir, chacun à sa manière, parfaitement rendu : le président du Conseil russe et le ministre des Affaires étrangères à la Douma d’Empire, avant même que M. de Bethmann-Hollweg eût envoyé sa note, et pour couper court aux machinations de paix séparée ; M. Lloyd George, soutenu par M. Asquith, à la Chambre des Communes; M. Aristide Briand, chez nous, à la Chambre et au Sénat; M. Sonnino, à la Chambre italienne, dans un discours qui mérite de demeurer comme un modèle, et, ce qui vaudrait mieux, d’être pris pour règle. Leur réponse écrite ne peut sûrement pas dévier d’une ligne de leurs premières déclarations : les quatre Puissances se tairont, écouteront, parleront toutes ensemble. Tant qu’on ne fait que les inviter à une conversation in généralibus, elles n’ont qu’à passer: si des précisions suivent, elles se concerteront et, toutes ensemble, exprimeront, dans un document commun, une résolution sur le fond de laquelle elles sont préalablement et invariablement d’accord. Là encore, il y aura unité d’action sur un front unique. La manœuvre diplomatique allemande, comme la manœuvre stratégique, est manquée.
Notre nouvelle victoire, sous Verdun, est arrivée, même à cet égard, merveilleusement à point : riposte incontestable, devant nos alliés et devant les neutres, aux succès de Mackensen et de Falkenhayn en Valachie. Que nous ayons, sur dix kilomètres de front, regagné trois kilomètres de profondeur, ramenant nos lignes à 1 500 mètres, par endroits, des points par où elles passaient avant le 21 février; que nous ayons fait 11 000 prisonniers et enlevé au Kronprinz 115 canons, 44 obusiers, plus de 100 mitrailleuses ; que nous ayons