donné à la ville un peu plus d’air et que nous soyons redescendus dans la plaine vers Bezonvaux ; ces résultats ne sont pas négligeables en eux-mêmes ; ils ne le sont pas à Verdun ; ils ne le sont pas pour la France; mais bien plus : dans la circonstance, l’événement prend, pour l’Entente tout entière, une valeur considérable. Le général Mangin n’a rien dit de trop, dans son ordre du jour, en disant à ses soldats : « Aux hypocrites ouvertures de l’Allemagne, la France a répondu par la gueule de vos canons et par la pointe de vos baïonnettes. Vous avez été les bons ambassadeurs de la République : elle vous remercie. »
Comme s’il n’eût fallu que ce coup de pouce pour rétablir la balance du Destin, il semble qu’en Roumanie la situation se raffermisse et se stabilise. En Macédoine, elle est stagnante. En Grèce, elle reste obscure et trouble. Si près de la minute où tombera dans l’histoire la troisième année, et où montera vers l’histoire la quatrième année de cette série fatale, mais si grande que la pareille ne s’était jamais vue, lorsqu’on se recueille, les motifs d’espérer, de croire et d’agir l’emportent infiniment sur ceux d’hésiter et de douter. Pourtant, nous ne mesurerons bien notre force que si nous mesurons aussi notre faiblesse. Le point faible de l’Entente, en face de l’Empire allemand, maître de l’Europe centrale et disposant d’elle comme de l’Allemagne même, n’est ni dans l’armée, ni dans la nation, ni désormais dans le commandement : il est dans le gouvernement. Qui que ce soit, et quel qu’il soit, mais un gouvernement. Le meilleur est celui qui existe, à la condition qu’il gouverne. Tout changement de personnes étant un désordre, il s’agit, non d’en changer, mais de les changer. Ce ne sont plus les partis qu’il faut servir et satisfaire, ce ne sont plus nos amis qu’il faut aimer, c’est la patrie.
CHARLES BENOIST.
Le Directeur-Gérant, RENE DOUMIC