Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 37.djvu/638

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour un bandit comme Villa et il assure que, si l’on voulait être juste pour lui, on verrait qu’il poursuit sa tâche en silence, aussi bien que le permet l’iniquité qui lui est faite, et qu’il ne demande rien, sinon d’être laissé en paix. Il répète que, s’il l’avait voulu, il aurait pu, de longue date, prendre le pouvoir ; que maintes personnalités influentes l’avaient supplié de mettre un terme à la désastreuse administration madériste ; qu’il ne recherche pas de fins intéressées ; que ses habitudes et ses besoins sont ceux d’un vieux soldat, et que, surtout, il n’a pris aucune part à la mort de Madéro. »

« Sur ce point, dit vivement l’écrivain, on peut causer des heures entières avec des gens appartenant à tous les milieux, sans découvrir aucune preuve de la participation directe de Huerta au meurtre de l’infortuné président. » Ainsi la femme du diplomate américain ne craint pas de se mettre en opposition directe avec son gouvernement…

Le 9 avril survient l’incident de Tampico. On se rappelle peut-être les faits. Un détachement d’une dizaine d’hommes envoyés à terre en corvée par le croiseur américain Dolphin, qui était en rade, fut arrêté en bloc par l’excès de zèle d’autorités subalternes, puis mis en liberté une ou deux heures plus tard, par ordre du général commandant la place, avec l’expression de ses regrets. Le Cabinet de Washington avait « son » incident. En quelques heures, l’affaire avait pris les proportions voulues. Le gouvernement mexicain avait jugé d’abord suffisantes les excuses officiellement formulées par le général Zaragoza, dont la responsabilité était seule en cause. Mais Washington exigeait encore une salve de 21 coups de canon pour saluer le pavillon étoile, à titre de réparation complète pour l’offense. Huerta offrait de soumettre le cas à l’arbitrage de La Haye : sa proposition fut écartée par M. Bryan. Mme O’Shaughnessy s’en étonne. M. Bryan n’est-il pas l’apôtre de la paix à tout prix ? Une dernière proposition est faite par Huerta qui demande, pour consentir définitivement au salut, que le chargé d’affaires des États-Unis donne, tout au moins, l’assurance écrite et sur sa parole, qu’il y sera répondu selon l’usage. Cette offre est encore déclinée. Le Rubicon est franchi. Il n’y a plus de place que pour l’intervention.

Pleins pouvoirs sont donnés à M. Wilson par le Congrès qui lui ouvre, de plus, un crédit de 100 millions de dollars. Le 21 avril, au malin, Veracruz est occupée, après un court