qu’il fera !… Si, marchant dans les rues, tu aperçois d’un œil malin l’homme ralentir sa marche pour te suivre et te considérer quelques instans de plus, avec quel art tu profites du plus petit obstacle qui se trouve dans ton chemin (ou que tu vas chercher exprès), pour avoir occasion de soulever les plis mystérieux qui laissent apercevoir alors le chemin du bonheur. »
Avouez que Jean-Jacques n’aurait pas trouvé mieux. Et ce que dit, ou ce que montre ici la parole, Grétry ne va pas jusqu’à prétendre que la musique sache le montrer et le dire. On s’étonne même qu’après les pages consacrées aux femmes, le chapitre de l’« application » musicale, soit parmi les plus sommaires et les moins pertinens. Le musicien, parlant après le psychologue, se contente ici d’assurer ses jeunes confrères qu’ils doivent chercher la leçon de toute leur vie, et de tout leur génie même, dans leur première leçon d’amour. C’est au temps des amours qu’il sied de méditer et de préparer les ouvrages d’imagination. Ainsi firent, d’après Grétry, Greuze, et Voltaire, et La Harpe ( ! ). « La première passion de l’homme est son premier maître… C’est après avoir aimé que l’artiste donne à ses productions le vernis du beau idéal, qui n’exclut pas la vérité, mais qui l’embellit. »
On ne saurait énumérer les cas observés par l’auteur de cet étonnant catalogue. Encore une fois, tout l’ordre sentimental y passe. Il n’est pas un élément, un détail de cet ordre qui laisse indifférent le musicien moraliste. Ainsi la pure mélodie lui paraît « le miroir de la douceur, de la pudeur par caractère. Une modulation, dans ce cas, est une faute. Qui dit modulation, dit combinaison, et jamais aucun des accens de la pudeur, de la candeur, ne fut combiné. » Ailleurs : « le jaloux amoureux forme de longs intervalles dans son chant ; plus il craint d’accuser celle qu’il aime, plus il donne d’assurance à ses tons toujours fiers et orgueilleux. Il emploie souvent le genre chromatique, qui est à la fois douloureux et sinistre : douloureux pour le jaloux qui veut intéresser ; sinistre pour ceux qui l’écoutent et surtout pour celle qui est l’objet de ses transports jaloux. » Ma foi, cela n’est pas si mal et l’on aurait presque envie de reprendre d’après de telles indications, et pour les vérifier, l’étude d’un rôle ou d’un personnage lyrique comme l’Otello de Verdi.
Autre recette : pour l’amour maternel : « Les chants de