doyenne des « filiales » de l’Institut, puisque, l’Académie de France à Rome approchera bientôt de son troisième centenaire[1]. Mais, déjà parvenue à l’âge respectable de soixante-dix ans, ayant traversé quelques vicissitudes et assisté à plusieurs révolutions, elle a pu croire qu’après la chute d’une dynastie bavaroise et l’avènement d’un nouveau régime, garanti même pécuniairement par l’intervention amicale de la France, de l’Angleterre, de la Russie, puissances libératrices de l’hellénisme opprimé, la tyrannie germanique était bannie à tout jamais du sol sacré de la Grèce. Elle s’étonna fort, après la campagne victorieuse des Grecs contre les Turcs et contre les Bulgares, — campagne organisée, avec la patriotique confiance du grand Venizelos, par une mission militaire française, — de voir le fils du regretté roi Georges se coiffer d’un casque à pointe et porter en cérémonie un bâton de feld-maréchal prussien. On saura plus tard quels avertissemens sont venus de cette maison française, qui ne s’est jamais endormie dans la contemplation du passé, et dont les fenêtres sont largement ouvertes sur la lumière et sur la vie. Mais ce n’est pas le moment des conversations diplomatiques. Sitôt que le canon eut tonné sur la Meuse et dans les Vosges, nos jeunes « Athéniens » quittèrent l’attrayant décor de Délos et de Delphes et les chantiers de Thasos, fertiles en marbres ingénieusement ciselés, pour prendre leur poste de combat sur le front occidental, tandis que l’énergique directeur de l’École d’Athènes, prévoyant les événemens qui devaient prolonger le front de bataille en Orient jusqu’aux rivages de la Macédoine, explorait les bords marécageux du Vardar, visitait Doiran et Demir-Hissar, suivait la frontière bulgare jusqu’à Oxilar, et faisait le relevé topographique de tout le paysage que domine le mont Olympe. Lorsque la Turquie d’Enver pacha nous eut déclaré la guerre par ordre du Kaiser, ces jeunes soldats de la France, devenus presque tous officiers sur le champ de bataille, revinrent aux parages où avaient fleuri leurs plus beaux rêves, et où désormais leur connaissance des langues, des coutumes, des populations locales, jointe à leur bravoure, déjà éprouvée, pouvait rendre les plus signalés
- ↑ Liste des pensionnaires de l’Académie de France à Romev publiée d’après les documens officiels, sous les auspices de l’Académie des Beaux-Arts, par M. Jules Guiffrey, membre de l’Académie, avec le concours de M. J. Barthélémy, rédacteur au secrétariat de l’Institut. Paris, Firmin Didot.