Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 38.djvu/331

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

organisés beaucoup plus tard, en 1197, et qui, plus Allemands que Croisés, abandonneront assez vite l’Orient pour aller guerroyer les siècles suivans dans les Marches de Prusse. Hospitaliers, Templiers et plus tard Teutoniques sont partie intégrante de l’armée du roi de Jérusalem, — encore que celui-ci n’en ait la disposition qu’en admettant comme ses lieutenans en campagne les trois grands maîtres, toujours chevaliers de haut rang, précieux par leur valeur comme par leur pouvoir, parfois incommodes, en tout cas nécessaires. Car, tous ces élémens réunis, l’armée du royaume, même aux grands jours, dépassera rarement 40 000 hommes.

De cette armée le Roi est donc le chef reconnu. C’est lui qui déclare la guerre et l’arrête, car, seul, il peut conclure les trêves, — l’Islam autant que la Croix interdisant aux deux partis de conclure la Paix. C’est lui encore qui est maître suprême des forteresses : il en fait élever, il en fait détruire : car « bien la peut faire abattre, li rois, la forteresse, dit l’Assise, se il voit que (est) trop grave au reiaume celuy chasteau. »


Le Roi, chef d’armée et maître de la guerre, est aussi, après le coup d’Etat d’Amaury, législateur suprême, haut justicier ; il est maître de ses finances, protecteur de l’Eglise.

Le Roi, dit la Clef des Assises, peut « faire et amender l’Assise » (la Loi), et quatre ou cinq textes aussi formels corroborent celui-ci. Sans doute, en vertu de la constitution primitive, ne pouvait-il faire la loi qu’avec le concours de Commissions de la Haute Cour et de la Cour des Bourgeois, et d’autres textes l’affirment. Mais l’initiative de la loi lui restait, et de règne en règne le Roi sut accroître sur ce point son pouvoir : le Livre des Assises n’est que le recueil des lois édictées par les souverains qui siégeaient à Sion.

Le Roi est aussi haut justicier, « bon justicier, dit le chapitre VIII des Assises, et cruel justicier là où il afiert (convient). » Il est à la vérité, assisté de sa « Cour ; » mais si, au début, il semble lui être soumis, il paraît vite trancher du juge suprême et, s’il préside un tribunal, rend l’arrêt en président tout-puissant. Seulement l’intervention même de la Cour féodale, — dans l’application de la loi comme dans sa confection, — implique