États-Unis ne sont point en guerre ouverte et déclarée avec l’Empire allemand, l’Allemagne, juridiquement, est pour eux une Puissance « amie. » On voit le point. M. Wilson, quoiqu’il soit du métier, et sans doute parce qu’il en est, n’a eu d’apaisement que lorsqu’il a eu consulté des collègues, de hauts fonctionnaires, de hauts magistrats, et le plus haut de tous après le président de la Cour Suprême, l’attorney général de la Confédération. D’une voix unanime, ils lui auront dit que cette loi de 1819, promulguée, sous l’administration de Monroe, au moment où, Jackson ayant, malgré ses instructions, envahi la Floride, alors territoire espagnol, et deux Anglais qui servaient dans les rangs adverses ayant été tués, les États-Unis s’étaient mis en délicatesse à la fois avec l’Espagne et avec l’Angleterre, fut une loi de circonstance ; mais qu’aujourd’hui, envers l’Allemagne, le cas est différent jusqu’à être renversé: ce ne sont pas les États-Unis qui ont attaqué des vaisseaux allemands et compromis des existences allemandes ; mais bien l’Allemagne, qui a « réellement sacrifié des vaisseaux américains, des existences américaines; » et que sacrifier des vaisseaux et des existences n’est point se conduire en Puissance « amie. » Qui détruit mon bien, tue mes hommes, confisque mon droit et ma liberté, je puis bien encore, selon le protocole, lui donner le nom que je veux ; mais, en fait, ce n’est plus mon ami. L’avis de l’attorney général, comme tous les autres, aurait été catégorique. Quoi qu’il en soit, M. Wilson les ayant recueillis, et bien qu’ils aient confirmé son opinion personnelle, a résolu d’inviter le Sénat à introduire dans son règlement un paragraphe qui permette à l’avenir d’empêcher, de limiter ou de briser l’obstruction. Sans retard, les crédits ont été votés, avant le 4 mars, par le Sénat même : 150 millions de dollars pour parera toute éventualité; 1 15 millions, pour hâter les constructions navales, 35 millions pour augmenter le nombre des sous-marins; et 535 millions de dollars, encore, pour renforcer la marine fédérale : en tout, plus de quatre milliards de francs. C’est une assez belle entrée de jeu, et c’est une assez franche entrée en scène. La situation évolue et mûrit. M. Wilson, inaugurant sa seconde présidence, l’a définie, devant 50 000 personnes, dans son discours du Capitole, qui est une page aussi claire que noble d’accent et d’une pure beauté, exempte des préparations, des précautions oratoires et des réticences qui parfois ont pu sembler mettre, dans ses notes diplomatiques, comme une hésitation de pensée ou de volonté. L’Allemagne aurait tort de se réjouir. La marche du Président est lente et mesurée, mais ce n’est déjà plus la sienne : c’est celle de la fatalité.
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