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temps immémorial pour prendre au piège leur gibier accompagne d’une façon bizarre le moderne et diabolique fil de fer barbelé. Sur ce territoire de brousse épaisse et de forêts équatoriales, sauvage et peu connu, la plus grande qualité du soldat est l’art du bushman : « se maintenir en contact » est la chose la plus difficile, même pour une petite troupe et le citadin s’égarerait vite ici, une fois qu’il aurait perdu contact avec sa section. Une empreinte de pas sur un sentier, l’herbe foulée par le passage des hommes, un lointain filet de fumée ou le bruit d’une petite branche craquant sous le pied sont pour nous d’une importance capitale. Un combat peut se livrer et se décider rien que par la perception d’un de ces détails. Aucun Européen de naissance n’a l’instinct des forêts de l’Africain central et des deux côtés les indigènes sont les yeux et les oreilles des forces opposées. Sans eux nous irions au combat aveugles et sourds, et, s’ils n’étaient là pour porter les provisions et les munitions, nous mourrions de faim et impuissans. »


L’OFFENSIVE BELGE

Au moment où nous quittons l’armée britannique, depuis plusieurs semaines déjà l’heure était venue pour les Belges de reprendre eux aussi l’initiative des opérations ; le général Tombeur attaque, alors, à la fois dans deux directions : par le Nord et par l’Ouest.

Dans cette zone, les conditions géographiques jouent un rôle prépondérant, et sur un aussi vaste territoire, elles varient sans cesse. Aussi, faut-il y distinguer plusieurs secteurs dont : le Bukoba, au Nord du Victoria Nyanza ; le Ruanda, près du lac Kivu ; l’Ousoumburu, sur la Ruzizi, puis enfin, entre Tanganyka et Victoria Nyanza, l’Ouroundi et le pays de Tabora. Leur examen successif est indispensable à la compréhension des faits militaires.

La province du Ruanda s’étend du lac Kivu à la Ragera. Le hauptmann Wintgens, avec mille fantassins munis de mitrailleuses et de batteries de campagne, y tient les formidables positions de la Sebea. Ce sont trois massifs, hauts de 2 000 mètres : les monts Kama, Nyondo et Mungwe, au Sud de la rivière Sebea. Dès lors, il s’agit d’une véritable guerre de montagne. Les pentes Ouest du Kama s’inclinent vers le lac