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s’opère. Alors, le 2e régiment avec le lieutenant-colonel Thomas franchit la Ruzizi et, le 6 juin, entre dans Usambara, localité importante à la pointe septentrionale du Tanganyka. Mais il s’y arrête à peine et déjà le voici sur le chemin de Kitega.

Comme on le constate, les différentes colonnes progressent par étapes successives qui s’articulent entre elles et forment un ensemble brisé, mais constituant quand même un tout. Ne dirait-on pas un damier sur lequel les pions sont poussés l’un après l’autre et ne rappellent-ils pas aussi ce jeu de notre enfance où les moutons devaient cerner le loup, l’empêchant de passer entre eux pour l’acculer au fond du damier et l’y déclarer battu ?

Le 6 juin, le Ier régiment arrive de Nyanza, se dirige aussi vers Kitega et bat l’ennemi à Kiwitawe ; le 12 juin, forçant les passages de l’Akanjaru il entre dans Kitega quatre jours après.

Sur ces entrefaites, le chef du 3e régiment apprenait que le major Wintgens reformait ses troupes précédemment battues. On le signale à la mission de Kannija, au Sud du lac Tchohona. Un détachement se dirige vers ce point, surprend l’ennemi, lui tue beaucoup de monde et disperse les derniers élémens qui s’enfuient.

Une pareille poussée, victorieuse sans doute, mais obtenue non sans perte contraint les Belges à un léger arrêt. Il faut regrouper les forces, activer les colonnes de porteurs, regarnir les caissons, bref, reprendre la troupe bien en main.

Le front alors occupé par l’armée belge, — il ne s’agit pas, bien entendu, d’une ligne continue, comme en France, — suivait à peu près, au Nord, la Kagera pour se rattacher ensuite au Tanganyka par une oblique prononcée. Ces préparatifs devaient occuper le 3e régiment de la fin de mai au 5 juin. Le major Bataille a choisi pour les faire en paix la région de Nsasa, à l’Est du lac Mugesera. Après quoi, il lui reste à tenter la traversée de la dangereuse rivière dont nous avons parlé, puis de conquérir la province de Bukoba. Attaquer de front serait folie, autant vaudrait condamner à mort la colonne tout entière. Aussi, faut-il d’abord fixer l’ennemi sur certains points et voilà pourquoi on l’attaque sur ses trois principales positions : le Kayeye, la Migera et le Rusomo, trois croupes puissantes aux à-pics vertigineux. Et pendant que les canons tonnent, que plusieurs assauts sont simulés, une forte colonne passe la Njawarunjo, c’est-à-dire la Kagera qui s’appelle ainsi dans la première