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Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 39.djvu/536

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tous ceux qui y prirent part, à quelque poste qu’ils aient combattu... Mieux vaut avoir bien rempli son temps, si bref soit-il, que de prolonger une existence inutile. Avoir participé à une grande œuvre, c’est tenir, dans l’histoire, une place qui ne nous sera pas ravie. »


Telles sont les idées dont se nourrissent et vivent les Allemands, telles sont les forces morales qu’ils apportent à la lutte. Quelles sont celles dont nous disposons, et que valent-elles, comparativement ?

Certes, il est avantageux de nous persuader que nos forces morales sont supérieures à celles de l’adversaire, et le patriotisme nous y dispose. Mais la persuasion serait sans doute encore plus profonde et efficace, si elle trouvait sa justification dans un examen méthodique et impartial des choses.

Nous n’avons, nous, ni ne saurions nous arroger la prétention de refaire le monde d’après nos idées ou nos intérêts, et, au nom d’un sens de l’objectif et de l’absolu que nous serions seuls à posséder, de décréter que, d’un bout à l’autre du temps et de l’espace, les êtres et les faits sont tels que le pose, à son gré, notre moi collectif. L’idée ne nous viendrait pas, par exemple, d’enseigner dans nos écoles que l’Allemagne ne se compose que de barbares et de Celtes, comme on enseigne dans les écoles de Berlin que la population des Etats-Unis comprend : 1° des nègres, 2° des Indiens, 3° des Germains. Nous prenons ingénument le monde tel qu’il nous est donné. Nous y rencontrons des êtres doués de ce que le commun langage appelle : la personnalité. Nous constatons que cet attribut, avec les qualités qu’il implique ou qu’il engendre, — conscience et possession de soi, liberté, capacité morale, sociabilité, originalité artistique et littéraire, — a été tenu, de tout temps, par les hommes les plus intelligens, pour la forme la plus élevée de l’existence en notre monde, et qu’en effet l’être qui en est doué résume en lui et dépasse ce qu’il y a de meilleur dans tous les êtres. Nous estimons donc que ce caractère, ébauché par la nature, susceptible de se perfectionner par un développement libre, doit être respecté là où il existe, favorisé dans son progrès là où il est en voie de formation. Et, constatant que la personnalité se rencontre dans les nations aussi bien que chez les individus,