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pour le voyageur de commerce, car ce n’est qu’à sa suite que s’établissent les courans commerciaux.

C’est précisément cette facilité qui sera d’un intérêt immense après le rétablissement de la paix. Une des révélations les plus inquiétantes de la guerre a été l’étendue de la dépendance économique dans laquelle se trouvaient la France et l’Angleterre par rapport à l’Allemagne. L’Angleterre achetait à l’Allemagne près du double de ce qu’elle achetait à la France (plus de 2 milliards à l’Allemagne, à peine plus d’un milliard à la France en 1913). Une enquête faite par l’Office national du commerce extérieur à Paris a montré d’une façon saisissante comment la France a été progressivement évincée par l’Allemagne sur le marché britannique pour une quantité de produits. De même, l’Allemagne s’était substituée chez nous à l’Angleterre. Nous achetions à l’Allemagne pour des millions de francs de papier, de tissus de coton, de laines et d’effets de laine, etc., et toute une collection de produits pour lesquels nous ne demandons qu’à devenir les cliens de la Grande-Bretagne.

L’Angleterre et la France doivent reprendre l’une chez l’autre la place dont elles ont été délogées par l’Allemagne. L’Angleterre était arrivée étonnamment vite à devenir le plus gros client de l’Allemagne et, ce qui frappe le plus dès qu’on jette les yeux sur les statistiques, c’est combien fut régulière, continue dans son énormité, l’augmentation des exportations allemandes en Angleterre. C’est une augmentation moyenne de 100 millions pendant les cinq années qui précédèrent la guerre.

Pourtant, la France et l’Angleterre ont une raison toute particulière de multiplier leurs échanges. Comme le disait notre éminent ambassadeur à Londres, M. Paul Cambon, la nature a doté magnifiquement, mais de façons différentes, les deux pays. N’ayant ni les mêmes qualités de sol, ni les mêmes productions, ni le même climat, ils peuvent se compléter en prenant l’un chez l’autre ce qui manque à chacun d’eux. Je soulignais déjà l’importance de cette vérité ici même dans mon étude de 1913. Elle est du nombre de celles qu’il faut répéter tant, que nos industriels et commerçans n’auront pas su en tirer tout le parti qu’il convient. J’ajouterai même qu’il en est ainsi parce