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fatale, — du militarisme allemand. Il faut donc écraser ce militarisme ; il faut faire la paix « en battant l’homme armé jusqu’à ce qu’il se rende et reconnaisse l’erreur de ses voies, en le désarmant et en réorganisant le monde pour lui imposer désormais la suppression des aventures militaires. » Voilà comment « le Pacifiste qui se défend » veut la paix. Son ennemi le plus redoutable est « le Pacifiste qui se rend », the yielding Pacifist, disposé à accepter n’importe quelle paix, et dangereux par-là même comme cet autre utopiste que protège en Angleterre un étrange respect, le conscientious objector, celui qui, pour des « raisons de conscience, » ne veut pas combattre. Le combat nous a été imposé, : il nous reste à imposer la victoire.

C’est l’idée qui se mêle dans les deux premières parties de l’ouvrage aux observations, impressions et réflexions de M. Wells. Mais dans le dernier chapitre, « La fin de la Guerre, » il exprime une autre vue, celle que « la victoire, complète et dramatique, peut être achetée trop chèrement, » et que « ce qu’il importe de retirer de cette guerre, ce sont, non pas des triomphes, mais la paix du monde. » Le sens des réalités avait fait écrire à M. Wells, simple observateur, que la seule condition de cette paix était notre victoire. L’esprit de système incline M. Wells, quand il spécule sur le problème en théoricien, vers une autre solution.

Laquelle ? Celle où le point de vue de l’humanité remplace le point de vue des nations. Et ce point de vue, suivant lui, ne pouvait être que celui des neutres : un règlement mondial, a world seulement. Il écrivait avant l’intervention américaine et il la concevait alors sous les formes de la neutralité. « Il y a, parmi les élémens rationnels des centres belligérans, parmi les autres neutres et en Amérique, des forces intellectuelles qui coopéreront en permettant aux États-Unis de jouer ce rôle de tiers-parti impartial, qui devient de plus en plus nécessaire pour terminer la guerre à la satisfaction générale. » Nous n’avons pas besoin d’insister sur le caractère théorique, abstrait, de ce règlement, de cette paix « scientifique » entre des nations considérées comme des entités de même nature, ni sur la contradiction où se met l’auteur vis-à-vis de lui-même, après avoir si fortement marqué l’antithèse des belligérans. Si les États-Unis lui paraissaient tout qualifiés pour un rôle d’arbitre,