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plus d’un an, quand il avait été nommé curé de Lanquais, dans le Bergeracquois, où le suivait le petit Maurice, de plus en plus dominé par sa vocation.

Le 11 novembre 1901, le jour même de ses seize ans, Maurice Portas perdait son père. Il était alors, depuis un an, à l’école cléricale de Périgueux, et sa mère, devenue veuve, se retirait à Lanquais chez son cousin, où le jeune homme continuait lui-même à venir passer ses vacances et ses congés. Tous les deux ans, l’oncle, la mère et le fils allaient en famille à Notre-Dame de Lourdes, et Maurice se trouvait toujours comme transformé par ces journées de pèlerinage, où il montrait un entrain et une expansion extraordinaires. Enfin, il était entré au séminaire et, en 1910, était nommé vicaire à Nontron. Il avait alors vingt-cinq ans. Grand, élancé, toujours un peu timide, mais plein de bonne grâce, d’apparence frêle, mais vaillant, d’une bonté simple et d’une modestie vraie sous lesquelles se cachait une énergie douce, il avait plu tout de suite à la population. L’archiprêtre l’avait chargé du patronage des jeunes gens et, chaque année, certains d’entre eux partant pour le régiment, où ils allaient faire leur service militaire, comme il avait lui-même fait le sien, il ne cessait pas pour cela de les conseiller et de les suivre, leur écrivait fréquemment, et les lettres par lesquelles il leur continuait ainsi ses directions mettent particulièrement bien en relief sa physionomie ecclésiastique.

Le caractère le plus marquant de cet apostolat par correspondance est d’abord ce qu’il a de pressé et de bref. Les plus étendues de ses recommandations n’ont pas vingt lignes. D’autres n’en ont que cinq ou six. On dirait déjà des instructions envoyées d’un champ de bataille. Ce qu’on y remarque ensuite, c’est la sensibilité, la délicatesse des conseils, et ce qu’ils ont de doucement, mais de tenacement impérieux. Il y est répété, à chaque instant : « Il faut… On doit… C’est le devoir… » Sous l’affection et la tendresse, on sent bien vraiment le directeur. Enfin, on y est à la fois frappé par leur piété et leur familiarité. C’est le ton d’une camaraderie mystique, mais celui d’une camaraderie.

Il écrit ainsi à l’un de ceux que suivait plus spécialement sa sollicitude : « C’est pénible, mon cher ami, de quitter les siens. Mais ne sommes-nous pas faits pour cela les uns et les autres ? N’est-ce pas aussi en prévision de ces éloignemens que