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Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 43.djvu/191

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« Vois le feu de Vesta flamber comme un enfer,
Jour et nuit, pour couler des canons dans nos forges,
Et la source, où buvaient hier les rouges-gorges,
Tremper le fer battu des cuirasses de fer !

« Aux côtés des soldats, voix entrer dans l’Histoire
La sainte légion des femmes des tués :
Nos veuves, dont les yeux se sont habitués
A refouler leurs pleurs pour mieux voir la Victoire !

« Vois, quand passent les trains de soldats, accourir
Les enfans, du faubourg comme du val agreste,
Salut suprême et doux de la France-qui-reste
A la France-qui-part pour vaincre, — ou pour mourir !

« Ne veux-tu pas sentir le cuir des jugulaires
Ceindre ta gorge à la française et, vagabond,
Goûter combien le pain de ces soldats est bon
Qui quarante-quatre ans ont mâché leurs colères ?

« Ne veux-tu pas être de ceux qui n’ont pas craint
D’offrir leur sang, pour conquérir à coups de crosse
L’étendard des uhlans pour ma robe de noce
Et, pour mon lit de noce à moi, le lit du Rhin ?

« Viens donc ! Des bords du Var aux berges de la Rance
La diane est si pimpante aux lèvres du clairon !
Et si doux aux vainqueurs s’en revenant du front
Sera le doux sommeil qu’on dort aux champs de France !

« Vers la France viens-t’en ! A présent que tu sais,
N’est-ce pas que tu vas venir, pour qu’on te nomme
Un servant de la France et que ?… — Suffit ! dit l’homme,
— Je pique sur Paris : je veux être Français ! »