Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 43.djvu/624

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nécessaire un contre-assaut contre cette « attaque redoutable, » et disait avec sa morgue d’Allemand : « Ce livre eût sauvé l’Église romaine, si elle pouvait être sauvée. »

Lorsque Bossuet mourut, l’Académie ecclésiastique du collège romain de la Propagande entendit son éloge en italien et le fit imprimer : l’auteur faisait de lui l’image de l’évêque, « constitué évêque par Dieu dans toute la France sur tant d’âmes qui, par son moyen, passèrent à la vraie foi. » Rome savait ce qu’elle devait à l’action intellectuelle de Bossuet : elle oubliait les écarts de 1682 pour ne revoir en lui, à sa mort, que le controversiste par excellence de la Contre-Réforme catholique.

En face de la grande théologie française du XVIIe siècle, en face de notre science Bénédictine partout admirée, je cherche à citer, pour la même période, des noms d’outre-Rhin. En dehors de Canisius, que prêtèrent à la Germanie les Pays-Bas du XVIe siècle, je ne vois que des théologiens devenus obscurs, qui écrivaient en latin pour les séminaires, et puis, à Vienne, un prédicateur fameux, parfois bizarre, qui fit fureur sous le nom d’Abraham de Santa Clara. C’est en France, et là seulement, que fut accomplie, dans toute son ampleur, l’œuvre intellectuelle réclamée par le concile de Trente ; elle y fut accomplie pour l’Europe, elle y fit école, et cela d’ailleurs était bien conforme à la vocation missionnaire qui, dans ces mêmes siècles, poussait la France hors d’Europe, et dont il nous faut observer l’allure et les résultats.


IV

L’âme française, en son essence, est une âme missionnaire. « La nation des Francs a fructifié pour Dieu ; ce sont des fruits nombreux et très féconds, parce que non seulement elle croit, mais parce qu’elle en convertit d’autres, en leur apportant le salut. » Ainsi parlait au IXe siècle l’empereur Louis II, descendant de Charlemagne.

Léon XIII, en 1900, clôture le siècle par un jubilé ; et pour honorer l’œuvre chrétienne des cent ans écoulés, il exalte dans une cérémonie grandiose soixante-dix-sept nouveaux bienheureux. Leur utilité, leur gloire, fut de savoir mourir. Quelques-uns furent martyrs de Chine ; le plus grand nombre, martyrs