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de la Terreur. La fortune de la France fut vertigineusement ballottée. Le Génie du Christianisme, les traductions anglaise, italienne, allemande, russe, qui tout de suite en furent données, révélèrent au monde qu’il y avait une autre France que celle des philosophes. Et lorsque le monde fut rentré en repos, de Maistre, un jour de 1819, regarda de nouveau « cette nation extraordinaire, destinée à jouer un rôle étonnant parmi les autres, et surtout à se retrouver à la tête du système religieux en Europe. »


L’esprit religieux, déclarait-il, n’est pas éteint en France : il y soulèvera des montagnes, il y fera des miracles. Le Souverain Pontife et le sacerdoce français s’embrasseront, et dans cet embrassement ils étoufferont les maximes gallicanes.


Les « miracles » de notre esprit religieux, nous espérons les avoir montrés ; et quant à l’étouffement des maximes gallicanes, on le vit se réaliser au concile du Vatican, après que Louis Veuillot, par une campagne de vingt ans, eut préparé le sacerdoce français et le Souverain Pontife à « s’embrasser. »


De Maistre continuait :


Alors le clergé commencera une nouvelle ère, et reconstruira la France, et la France prêchera la religion à l’Europe. Et jamais on n’aura rien vu d’égal à cette propagande. Et si l’émancipation des catholiques est prononcée en Angleterre, ce qui est possible et même probable, et que la religion catholique parle en Europe français et anglais, souvenez-vous bien de ce que je vous dis, il n’y a rien que vous ne puissiez attendre.


L’émancipation des catholiques anglais a été accomplie. La France et l’Angleterre sont unies ; et dans les rendez-vous religieux où se rencontrent les nations de l’Entente, — à Paray-le-Monial, par exemple, au dernier printemps, — la religion catholique « parle français et anglais. » Joseph de Maistre n’avait rien d’impatient ; soyons patiens comme lui. Faisons crédit à notre « extraordinaire nation ; » et puisque d’après lui nous pouvons tout attendre, attendons.


GEORGES GOYAU.